Le Sénat se saisit lundi après l’Assemblée nationale du texte visant à inscrire le climat dans la Constitution, qu’Emmanuel Macron veut soumettre à un référendum sur lequel plane une grande incertitude, faute d’accord entre les deux chambres du Parlement.
Un article du JDD affirmant que le référendum était enterré a fait couler beaucoup d’encre dimanche, l’Elysée démentant cette information avant que le président lui-même insiste sur sa volonté que le texte « vive sa vie parlementaire ».
Suivant les préconisations de la Convention citoyenne sur le climat (CCC), il s’agit pour l’exécutif de graver à l’article 1er de la Loi fondamentale que la France « garantit la préservation de l’environnement et de la diversité biologique et lutte contre le dérèglement climatique ».
Le projet de révision constitutionnelle a été approuvé dans ces termes en première lecture par les députés le 16 mars.
Au Sénat dominé par l’opposition de droite qui s’en saisit maintenant,on a très tôt parlé de « coup politique ».
« Le climat et l’environnement sont des sujets trop sérieux pour faire l’objet de manœuvres », affirme au Figaro le président du Sénat Gérard Larcher. « Le Sénat n’a pas à sortir le président du mauvais pas dans lequel il s’est mis avec le +sans filtre+ » de la CCC.
L’organisation d’un référendum nécessite au préalable l’accord de l’Assemblée nationale et du Sénat sur un même texte.
« Ce dont je suis le garant », a souligné dimanche Emmanuel Macron, c’est qu’ »il n’y aura pas d’abandon. Ce texte va vivre sa vie parlementaire qui seule permet d’aller au référendum si les sénateurs et les députés s’accordent ».
Le pari est risqué pour le chef de l’Etat, mais sa promesse d’un référendum place aussi la droite sénatoriale devant un dilemme délicat, à un an de la présidentielle de 2022: offrir un succès à Emmanuel Macron ou bien s’opposer à une consultation des Français sur une thématique qui a le vent en poupe.
La commission des Lois du Sénat a ainsi adopté un amendement de son président François-Noël Buffet (LR), selon lequel la France « préserve l’environnement ainsi que la diversité biologique et agit contre le dérèglement climatique, dans les conditions prévues par la Charte de l’environnement », adoptée en 2005 sous l’égide de Jacques Chirac.
Cette rédaction supprime le terme « garantit », qui pourrait ouvrir la porte à une multiplication des recours en instituant une « quasi obligation de résultat », selon les termes du Conseil d’Etat.
La droite refuse également une formule qui donnerait à la préservation de l’environnement une forme de priorité sur les autres principes constitutionnels.
– « Vieux discours libéral » –
Pour M. Buffet, « sans produire d’effets juridiques nouveaux, cette rédaction aurait le double mérite, sur le plan symbolique, de réaffirmer l’attachement du peuple français à la préservation de l’environnement et d’y inclure expressément la lutte contre le dérèglement climatique, que la Charte ne mentionne pas ».
S’agissant d’un projet de loi constitutionnelle, la discussion s’engagera dans l’hémicycle sur la base du texte transmis par l’Assemblée nationale et l’amendement de M. Buffet devra être voté en séance publique.
Des amendements identiques seront portés par le chef de file des sénateurs Les Républicains Bruno Retailleau et par la commission de l’Aménagement du territoire.
Pour son président Jean-François Longeot (centriste), « la protection de l’environnement mérite mieux que des manoeuvres politiciennes ou des phrases creuses ».
L’exécutif tient toutefois à la terminologie initiale.
A gauche, le socialiste Eric Kerrouche juge « difficile de voter » la proposition de la droite sénatoriale « qui revient de fait à condamner le texte ».
Pour l’écologiste Ronan Dantec, Les Républicains « ne cherchent absolument pas à verdir leur image, au contraire (…) leur tendance est plutôt à rester sur l’idée +pas de contrainte pour l’économie+, le vieux discours libéral de la droite française ».
Le Sénat aura aussi à examiner durant la deuxième quinzaine de juin le projet de loi climat et sa batterie de mesures sur le logement, l’aérien ou la publicité, qui vient d’être adopté par l’Assemblée et doit traduire d’autres préconisations de la Convention citoyenne.
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