Le Syndicat des Indépendants (SDI) a annoncé jeudi assigner l’assureur Axa en justice pour le compte d’une dizaine de ses adhérents devant plusieurs tribunaux, estimant qu’au total 15.000 restaurateurs et autres professionnels pourraient tenter d’obtenir réparation de leurs pertes dues au Covid-19.
Le syndicat fait valoir que les deux tiers de ceux qui ont déjà fait la démarche ont eu gain de cause en première instance, forçant l’assureur à les indemniser.
Quelque 15.000 entreprises – surtout des restaurants, mais aussi selon le SDI des bars, hôtels, salles de sport, discothèques, spas- détiennent un contrat standard de l’assureur qui garantit les pertes d’exploitation dues à une fermeture administrative consécutive à une épidémie.
Depuis un an, Axa invoque, pour justifier son refus d’indemniser ses assurés, une clause de ce contrat qui exclut cette garantie « lorsqu’au moins un autre établissement » du même département a fait l’objet d’une « fermeture administrative pour une cause identique ».
Or, « sur environ 80 décisions en première instance, les deux tiers ont été favorables aux assurés », rapporte l’avocat Guillaume Aksil, du cabinet Lincoln Avocats Conseil, qui plaidera pour les adhérents du SDI.
Interrogé par l’AFP, l’assureur dit « comprendre la détresse et l’inquiétude dans laquelle sont plongés aujourd’hui nombre d’indépendants et de TPE », « raison pour laquelle, depuis le début de la crise, Axa France a mobilisé près de 3 milliards d’euros pour soutenir la relance des entreprises françaises ».
– Décisions en appel à venir –
En février, la Cour d’appel d’Aix en Provence a infligé à Axa sa première défaite en appel face à un restaurateur marseillais, en jugeant que la clause d’exclusion devait être écartée car elle « prive de sa substance l’obligation essentielle de garantie ».
Le groupe dit « attendre les prochaines décisions de Cours d’appel », constatant qu’en « première instance, un tiers des jugements ont débouté les assurés ». Les Cours d’appel de Toulouse et Rennes devraient se prononcer, respectivement le 25 mai et le 9 juin.
Après une « négociation amiable » au cours de laquelle des assureurs mutualistes ou bancaires ont, eux, versé des sommes forfaitaires pour éteindre les litiges, Axa s’est montré inflexible, selon le syndicat, qui revendique 25.000 adhérents, indépendants et TPE, qui a décidé de se tourner vers la justice.
« L’assureur a parfois fait un geste pour des clients à l’aura médiatique retentissante. Notre action vise à défendre des anonymes qui n’ont pas les moyens de rétablir un équilibre dans ce combat », explique à l’AFP son président, Marc Sanchez.
Selon lui, parmi les quelque 30 à 40.000 restaurateurs qui pourraient faire faillite à l’issue de la crise -selon des sondages de syndicats auprès d’adhérents- 15.000 pourraient « sortir la tête de l’eau » s’ils étaient indemnisés par Axa, et cela « allégerait le Fonds de solidarité, financé par le contribuable ».
Parmi les professionnels indemnisés, Johann et France-Marie Rossi qui gèrent le restaurant L’Ambata à Porticcio, en Corse, ont reçu une provision de 115.000 euros, qui a permis de « combler le découvert bancaire, payer les fournisseurs et faire des travaux: l’établissement situé en bord de mer, a souffert des embruns pendant la fermeture », dit M. Rossi à l’AFP.
Aujourd’hui « il n’y a même pas 1.000 procédures lancées en France » estime Me Aksil. « Cela signifie qu’il y a au moins 14.000 personnes dans la nature, qui peut-être ont droit à quelque chose… C’est eux que nous voulons informer: dans un an, il sera trop tard pour agir ».
Car les tribunaux, dit-il, ne tranchent ces litiges que dans les deux ans suivant le sinistre: après le printemps 2022, les assurés ne pourraient plus réclamer d’être indemnisés pour les pertes du premier confinement.
De son côté, le principal syndicat de l’hôtellerie restauration, l’Umih, privilégie la négociation avec les compagnies d’assurance.
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