Des milliers de personnes ont manifesté dimanche 2 mai contre la junte, certains espérant un « printemps révolutionnaire » en Birmanie où une puissante faction rebelle de l’est du pays a appelé d’autres groupes insurgés à l’unité face aux militaires.
Depuis février, malgré une répression sanglante, des manifestations quasi quotidiennes ébranlent le pays, une vaste campagne de désobéissance civile – avec des milliers de travailleurs grévistes – paralyse des secteurs entiers de l’économie et des opposants, passés dans la clandestinité, ont formé un gouvernement de résistance.
Répression sanglante
Des rassemblements se sont encore formés dimanche matin très tôt à Rangoun, des manifestants radicaux appelant à l’avènement d’un « printemps révolutionnaire ». Des jeunes se sont notamment rassemblés à un carrefour de la capitale économique avant de défiler rapidement dans les rues. Ils se sont vite dispersés pour éviter l’affrontement avec les forces de sécurité. « Notre chemin mène à la démocratie ! » ont-ils scandé, avec trois doigts levés en signe de résistance. Des explosions ont également retenti dans la matinée dans plusieurs zones de Rangoun. Les déflagrations se sont multipliées ces derniers temps dans l’ancienne capitale.
Des centaines de personnes ont aussi défilé dans la région de Mandalay (centre) avec en tête de cortège des moines en robe safran, portant le drapeau de la Ligue nationale de la démocratie (LND), le parti de l’ex-dirigeante Aung San Suu Kyi. La lauréate du prix Nobel de la paix 1991 n’a pas été vue en public depuis son arrestation lors du putsch qui l’a renversée le 1er février. Elle est depuis assignée à résidence. Dans l’Etat Shan (nord-est), les forces de sécurité sont intervenues contre des manifestants dans la localité de Hsipaw, faisant au moins un mort. « Il a été touché à la tête et est mort sur le coup », a témoigné un manifestant, qui a dit avoir dissimulé le corps de son ami pour éviter que les forces de sécurité ne l’emmènent. « Elles demandent le corps mais nous ne le donnerons pas. Ses funérailles auront lieu aujourd’hui », a-t-il expliqué à l’Agence France-Presse (AFP).
Dans l’Etat Kachin (nord), les forces de sécurité ont ouvert le feu sur les manifestants. Un homme de 33 ans a été touché à la tête, selon un manifestant qui a fait état de nombreux blessés. « Ils ont tous dû être soignés dans des planques. Ils ne pouvaient se rendre à l’hôpital, sinon ils y auraient été arrêtés », a expliqué un autre manifestant.
Près de 760 civils sont tombés sous les balles des forces de sécurité ces trois derniers mois et quelque 3 500 sont en détention, d’après une ONG locale, l’Association pour l’aide aux prisonniers politiques (AAPP). La junte, qui affirme que l’AAPP est une organisation illégale, assure de son côté que 258 manifestants sont morts, de même que 17 policiers et 7 militaires.
Plus de 2 000 réfugiés en Thaïlande
Dans plusieurs régions frontalières du Nord et de l’Est, la contestation a fait sortir de l’ombre plusieurs rébellions portées par des minorités ethniques en confrontation avec l’armée, dont certaines abritent dans les territoires qu’elles contrôlent des opposants ayant fui la répression de la junte.
Dans l’est du pays, où les affrontements entre l’armée et l’Union nationale karen (KNU) ont fait plus de 30 000 déplacés, selon l’ONU, des frappes aériennes de la junte ont visé dans la nuit de vendredi à samedi un secteur proche de la frontière thaïlandaise, provoquant une nouvelle vague de réfugiés. Plus de 2 300 Birmans ont franchi la rivière qui marque la frontière pour se réfugier en Thaïlande.
Dimanche, l’Union nationale karen (KNU) a appelé les autres factions insurgées à unifier leurs rangs face à la junte. « Jamais il n’y a eu une telle opportunité au cours de plus soixante-dix ans de révolution. Profitez-en et combattez la dictature militaire birmane », a déclaré le lieutenant-général Baw Kyaw Heh. Son message est adressé aux autres groupes rebelles dans l’Etat Karen, l’Armée démocratique bouddhiste karen (DBKA) et le Conseil de la paix KNU/KNLA, né d’une scission de la KNU – deux groupes qui restent silencieux depuis le coup d’Etat du 1er février.
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