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Chronique. Nulle, l’Europe ? L’Union européenne (UE), sa traduction institutionnelle, est tantôt insuffisante, tantôt envahissante, souvent incompréhensible et désespérément imparfaite. Elle a été sérieusement bousculée par la pandémie de Covid-19, qui a révélé des failles béantes, dont l’épisode de la vaccination est sans doute le symbole le plus cuisant. Et, pourtant, elle tourne ! C’est même le paradoxe européen : plus elle apparaît faible, plus elle se renforce, toujours dans le même sens giratoire.
Premier constat : il est vain de comparer les performances de l’Europe à celles de la Chine et des Etats-Unis. Ces deux pays sont des Etats unitaires, alors que l’UE est une union d’Etats. La différence dans le processus de prise de décision – centralisé à l’extrême en Chine, démocratique mais fédéral aux Etats-Unis, collégial à vingt-sept pour l’UE – est fondamentale. Pourtant, politiquement, les Européens ne peuvent s’empêcher de se mesurer aux performances des deux géants ; c’est parce qu’ils sont de plus en plus conscients de constituer, eux aussi, une entité géopolitique. Aux contours encore imprécis, certes, mais dont l’existence leur semble désormais impérieuse.
Deuxième constat : de plus en plus, les décisions prises par l’UE contribuent à l’élaboration de cette entité géopolitique. Cette semaine, par exemple, chaque Etat membre doit soumettre à Bruxelles ses propositions pour toucher sa part du plan de relance massif décidé en 2020 ; ce plan, Next Generation EU, a été adopté à l’échelle européenne pour remédier solidairement à la catastrophe économique provoquée par la pandémie. Mardi 27 avril, la France et l’Allemagne, qui sont à l’origine du plan européen, ont symboliquement présenté leur projet ensemble. Jusqu’ici, l’Europe tourne.
Une identité encore floue
Plus important encore, ce plan impose aux Etats membres de mettre à profit les dizaines de milliards d’euros de subventions pour transformer leurs économies. Ils doivent se plier à des critères précis et quantitatifs en matière de transition écologique, de transition numérique, de formation, d’éducation. Ce levier stratégique de l’économie du futur est utilisé pour la première fois par l’UE. Le président américain, Joe Biden, tente de faire exactement la même chose aux Etats-Unis avec ses propres plans de relance, certes gigantesques mais dont la logique rejoint, en réalité, celle des Européens.
Le programme Horizon Europe offre un autre exemple : il prévoit un budget de 95,5 milliards d’euros sur sept ans pour financer la recherche européenne. L’expérience des vaccins, conçus en partie par des cerveaux européens mais inoculés tardivement et chaotiquement dans les bras européens, a cruellement rappelé le rôle crucial de l’innovation et de la recherche, relayées par des capacités industrielles. Il y a quelques années, le concept d’autonomie stratégique ou de souveraineté européenne s’appliquait en priorité au domaine de la défense ; il recouvre plus largement aujourd’hui la science, le numérique, l’espace, l’industrie, la santé. Faisant le compte des trains qu’ils ont regardé passer sans monter à bord, les responsables européens se focalisent enfin sur ce qui peut leur donner accès à la locomotive : semi-conducteurs, hydrogène, cloud, calcul quantique…
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