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Cinq mois après la fin de la guerre au Haut-Karabakh, un conflit d’une autre nature oppose l’Arménie et l’Azerbaïdjan sur un dossier ultrasensible : les atteintes au patrimoine historique et culturel. Selon le décompte du Défenseur des droits arménien, Arman Tatoyan, 1 456 monuments, « essentiellement arméniens », sont passés sous le contrôle de Bakou après le cessez-le-feu du 9 novembre 2020, qui a consacré la défaite de l’Arménie et d’importantes pertes territoriales. Parmi eux figurent 161 monastères et églises, 345 pierres tombales historiques et 591 khatchkars – des stèles en pierre en forme de croix.
Les accusations de destructions se multiplient dans les deux camps. L’Arménie accuse l’Azerbaïdjan de se livrer à une démolition systématique et organisée de son patrimoine afin d’effacer toute trace de sa présence dans la région. Soucieux de défendre son image de pays multiculturel sur la scène internationale, l’Azerbaïdjan dément farouchement et accuse en retour les Arméniens d’avoir détruit des dizaines de mosquées et des centaines de musées, librairies et monuments ces trente dernières années, lorsqu’ils contrôlaient les territoires entourant l’enclave disputée du Haut-Karabakh.
« On reçoit des allégations de destructions tous les jours, explique-t-on à l’Unesco. Elles viennent aussi bien des autorités arméniennes qu’azerbaïdjanaises, d’ONG ou de la société civile. » Face aux menaces pesant sur le patrimoine culturel, l’organisation onusienne a proposé, dès la fin de la guerre, d’envoyer une mission d’expertise sur place pour dresser l’inventaire des biens à protéger et proposer des plans de réhabilitation ou de reconstruction. Sans succès jusqu’ici.
Deux églises détruites
La plupart des accusations sont pour l’heure invérifiables, l’accès aux territoires étant extrêmement difficile. Une enquête de la BBC et des images satellites ont en revanche permis de documenter la destruction de deux églises arméniennes depuis la fin de la guerre. La chaîne britannique, qui a pu se rendre sur place, a ainsi révélé, le 25 mars, qu’une chapelle construite en 2017 près de la ville de Mekhakavan, dans la région de Djebraïl, avait été entièrement rasée. La deuxième église, Kanach Zham, (« église verte »), avait été édifiée il y a plus de deux cents ans à Chouchi (Choucha en azéri), au Haut-Karabakh. Déjà endommagée pendant la guerre, elle est désormais presque totalement en ruine.
Azad Djafarli, le chef du service d’Etat de l’Azerbaïdjan pour la protection, le développement et la restauration du patrimoine culturel, soutient au Monde n’avoir « jamais entendu parler » de l’« église verte ». « C’est sans doute l’invention de quelques personnes », dit-il. Quant à l’église de Djebraïl, il assure qu’elle n’accueillait « que des soldats, et non des civils ». « Pourquoi avoir construit cette prétendue chapelle ? » s’interroge le fonctionnaire, précisant que « si un bâtiment n’est pas civil, il peut être légitimement visé par une attaque ».
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