Le pouvoir russe débute la liquidation du camp Navalny

L’offensive finale contre le camp Navalny est engagée, et elle dépasse largement la personne de son chef de file emprisonné depuis trois mois. Lundi 26 avril, avec une hâte inattendue, la justice a ordonné la suspension des activités des « QG Navalny », le principal relais sur le terrain du combat politique d’Alexeï Navalny.

La décision a été prise sans attendre les conclusions de la justice quant à l’attribution aux « QG » (« Chtab », en russe) du statut d’« organisation extrémiste ». Un procès en ce sens a débuté lundi, sans grand suspense quant à son résultat. La procédure est conduite à huis clos, sous le sceau du secret d’Etat, et concerne également l’autre organisation du camp Navalny, le Fonds de lutte contre la corruption (FBK). Le Parquet accuse ces structures de chercher à « créer les conditions de la déstabilisation de la situation sociale et sociopolitique » en Russie, « sous couvert de slogans libéraux ».

Sans attendre, donc, le procureur de Moscou a ordonné la suspension immédiate de l’activité des QG Navalny. Selon le document rendu public, la décision leur proscrit de publier du contenu sur Internet, et s’accompagne d’une interdiction de rassemblement et de participer à une élection.

« Ils hurlent tout simplement : nous avons peur de vos enquêtes anticorruption, nous avons peur de vos manifestations, nous avons peur de vos consignes de vote », commentait Ivan Jdanov, directeur en exil du FBK, dont le père est emprisonné dans une affaire d’attribution de logement aux allures de vendetta. S’agissant des consignes de vote, M. Jdanov fait référence à la stratégie de « vote intelligent » promue par Alexeï Navalny, qui consiste à faire battre les candidats du pouvoir dans les élections où le camp Navalny est interdit de participer.

« Trop dangereux pour nos employés »

De manière ironique, le procureur en question, Denis Popov, avait fait en novembre 2019 l’objet d’une enquête du FBK, qui l’avait accusé, entre autres, de détenir des propriétés et un hôtel au Monténégro par le biais de sa femme. Le FBK devrait faire l’objet d’une suspension similaire dans les jours à venir, avant d’être lui aussi classé extrémiste.

La structure spécialisée dans les enquêtes anticorruption avait déjà été désignée « agent de l’étranger » en 2019, pour avoir reçu un don d’une dizaine d’euros d’une source mystérieuse en Espagne (les organisations du camp Navalny s’efforcent d’ordinaire de refuser tout don étranger pour ne pas donner prise à la propagande gouvernementale qui fait d’eux des ennemis de la Russie).

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