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Mathieu Duchâtel est le directeur du programme Asie de l’Institut Montaigne, et l’auteur d’un rapport, « Semi-conducteurs, la quête de la Chine », publié en janvier dernier.
Pourquoi la Chine peine-t-elle autant à développer sa filière microélectronique ?
Le premier problème est l’accès aux technologies étrangères. Les politiques américaine et taïwanaise ont toujours refusé de transférer les technologies les plus innovantes vers la Chine, en gardant un écart de trois générations avec elle. Deuxième difficulté : les ressources humaines ; et, enfin, l’investissement : l’approche chinoise de dire « on va tout acheter, parce qu’on a du capital » n’a pas fonctionné, parce que cela suscite désormais des réactions défensives. On l’a vu, la semaine dernière, en Italie, avec l’entreprise LPE, qui devait être rachetée par un fonds de Shenzhen : l’investissement a été bloqué par le gouvernement italien. Il y a une dizaine d’années, ce serait passé comme une lettre à la poste.
Dans ce contexte, les sanctions américaines poussent la Chine à doubler la mise sur cette industrie. N’est-ce pas contreproductif pour les Américains ?
C’est la problématique générale de tous les transferts de technologie. Sur les semi-conducteurs, il faut penser à la fois en termes de goulot d’étranglement, mais aussi de course de vitesse. On constate le retour d’une politique industrielle aux Etats-Unis, avec un soutien à la R&D et à la production de puces sur le sol américain. Demain, ce seront les Japonais et, après-demain, les Européens. Donc, la Chine est confrontée à un double problème : les restrictions aux transferts de technologies, et la concurrence qui continue à avancer.
« Tant que la Chine n’aura pas franchi le seuil des 7 nanomètres, les États-Unis profiteront de leur avance pour diffuser largement leur technologie »
Cela ne veut pas dire qu’elle n’aura pas accès aux semi-conducteurs de Taiwan Semiconductor Manufacturing Company [TSMC] pour certaines marques comme Xiaomi. L’interdépendance n’est pas complètement détruite. Mais tant que la Chine n’aura pas franchi le seuil des 7 nanomètres, les Etats-Unis profiteront de leur avance pour diffuser largement leur technologie, par exemple dans l’industrie de l’armement. On le voit avec le choix du gouvernement fédéral américain de financer une fonderie de TSMC en Arizona : les finalités militaires des semi-conducteurs, cela représente 1 % des ventes de l’industrie, mais, en valeur stratégique, c’est bien plus. L’idée est qu’un cercle vertueux se produise entre production et R&D, et que cela nourrisse plusieurs secteurs.
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