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Près de trois ans d’enquête et des constatations accablantes pour le concessionnaire du pont de Gênes. Le parquet italien a rendu, jeudi 22 avril, ses conclusions sur la tragédie du pont autoroutier Morandi, laquelle avait fait 43 morts le 14 août 2018. Situé sur un axe essentiel pour les échanges entre le sud et le nord du pays, cet imposant viaduc s’était écroulé et avait entraîné dans sa chute plusieurs dizaines de véhicules.
Ce drame avait mis en lumière le mauvais état des routes, des ponts et des voies ferrées en Italie, où les infrastructures pâtissent d’un déficit chronique d’entretien et d’investissement. Le pont Morandi souffrait des mêmes maux, selon divers extraits du rapport d’enquête publiés dans la presse transalpine.
« Entre l’inauguration [du pont], en 1967, et l’effondrement − cinquante et un ans, donc −, il n’a pas été procédé aux interventions de maintenance minimales pour renforcer les haubans du pilier numéro 9 [qui s’est affaissé le jour du drame] », ont ainsi pu constater les magistrats chargés de l’affaire, dont les propos ont été repris par les agences de presse. Ces derniers ont également fait savoir que, depuis 1982, le concessionnaire privé du viaduc avait financé moins de 2 % des 24 millions d’euros consacrés aux interventions menées sur la structure de l’ouvrage.
Au fil des années, les contrôles de sécurité effectués sur le pont en lui-même auront été « lacunaires et inadéquats ». Les contrôles visuels sur les structures, en particulier, étaient « effectués systématiquement depuis le bas du pont, à l’aide de jumelles ou de longues-vues, et non de près : ils n’étaient donc pas en mesure de fournir des informations fiables quant à l’état du pont », détaille en outre le ministère public.
« Nous espérons avoir un procès rapide »
Soixante-neuf personnes sont poursuivies dans cette affaire, au même titre que la société Autostrade per l’Italia (ASPI), gestionnaire du pont, et que la société d’ingénierie Spea – toutes deux filiales du groupe Atlantia, lui-même contrôlé à 30,25 % par Edizione, la holding de la famille Benetton.
La plupart des mis en cause sont des cadres ou des techniciens employés à l’époque par ASPI ou par Spea. Parmi eux figure le directeur général d’Atlantia d’alors, Giovanni Castellucci, ainsi que l’ancien patron de Spea, Antonino Galata, et plusieurs fonctionnaires du ministère des infrastructures.
Les prévenus disposent pour l’heure de trois semaines pour répondre aux conclusions des enquêteurs, délai à l’issue duquel le parquet pourra demander leur renvoi en procès, ou alors requérir un non-lieu.
Giancarlo Cancelleri, secrétaire d’Etat aux infrastructures du gouvernement de Mario Draghi, s’est dit stupéfait en découvrant les conclusions du parquet eu égard à la « totale absence de maintenance du pont ».
« Maintenant nous espérons avoir un procès rapide, parce que nous avons un engagement à respecter auprès des familles des victimes : les noms et prénoms des responsables de cette tragédie, et une peine assurée. »
Pour Egle Possetti, président de l’Association des victimes de la catastrophe, l’enquête a percé à jour « la maintenance honteuse » du pont, jusqu’à son effondrement.
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