Ni mensonge, ni tromperie. La banque Natixis, poursuivie en justice pour sa communication pendant la crise des subprimes, a défendu mercredi sa sincérité et sa prudence, lors de la dernière journée d’un procès au cours duquel le ministère public a requis une amende de 7,5 millions d’euros.
La décision des juges sera rendue le 24 juin.
« On a été prudent. (…) Est-ce qu’on a eu la volonté de tromper le marché? Non. Et sans l’intention il n’y a pas de délit », a plaidé avec vigueur Me Éric Dezeuze, l’un des avocats de l’établissement bancaire.
Celui-ci est jugé depuis le 29 mars devant le tribunal correctionnel de Paris pour « information fausse et trompeuse », pour des faits remontant à 2007, avant l’éclatement de la crise financière de 2008/2009.
« Est-ce qu’on a menti ? (…) il n’y a rien de tel dans le dossier. Dès le mois de mars (2007), le mois d’août », les échanges internes « parlent d’une exposition limitée, on y croyait », a défendu l’avocat.
Natixis, filiale du groupe bancaire mutualiste BPCE créée et introduite en Bourse fin 2006, est jugée pour avoir sous-estimé, dans un communiqué de novembre 2007, son exposition indirecte aux subprimes, un type de crédit hypothécaire distribué aux États-Unis.
− Exégèse de communiqué −
Dans ce communiqué sur ses résultats du troisième trimestre de l’année, la banque avait indiqué que les risques portés sur les subprimes étaient « limités ».
La crise coûtera finalement cher à la jeune banque, qui verra son cours s’effondrer, passant de 19,55 euros lors de son introduction en Bourse à moins d’un euro par action en 2009.
Quatorze ans après les faits, les débats devant le tribunal ont largement consisté à faire l’exégèse − très technique − du communiqué de novembre 2007, afin de déterminer si la banque y avait correctement chiffré son exposition aux subprimes et si l’emploi du terme « limité » était alors justifié.
Concernant la communication globale du groupe, « il y a quand même pas mal de choses à (en ) dire », a estimé mercredi le ministère public, qui a requis une amende de 7,5 millions d’euros, le montant maximal.
« Bien sûr, on n’est pas dans une affaire de fraude comptable, Natixis ne présente pas des comptes délibérément faux », a reconnu le vice-procureur Patrice Amar.
Mais « il y a une présentation qui ne nous permet pas d’anticiper ce qui va se passer par la suite, parce qu’il n’y a pas assez de détails », notamment sur la nature des financements et des engagements de la banque, a-t-il affirmé, en estimant que « l’infraction de l’information fausse et trompeuse » était caractérisée.
− Seul procès subprimes en Europe −
Beaucoup de petits porteurs, attirés par l’entrée en bourse de la banque, ont vu le fruit de leur investissement fondre comme neige au soleil.
Fin 2006, « nos conseillers de Caisse d’Épargne et de Banque Populaire nous ont fait une cour effrénée pour que nous achetions des actions Natixis. L’objectif fixé à nos conseillers était de récolter au total 5 milliards d’euros auprès de braves gens et ils ont réussi », a relaté lors de sa plaidoirie mardi Me Alain Géniteau, qui représente 746 petits porteurs emmenés par l’Adam, l’Association de défense des actionnaires minoritaires.
À l’époque « l’action Natixis nous a été présentée comme un substitut au Livret A, aussi sûr et plus rémunérateur », a souligné l’avocat.
Entre les demandes de réparation au titre d’un préjudice de « perte de chance » et celles au titre d’un préjudice moral, les avocats des parties civiles ont réclamé plus de 5 millions d’euros à Natixis.
Pour le ministère public, ce procès a toutefois mis en lumière un problème auquel toutes les banques ont été confrontées à l’époque de la crise.
« À ma connaissance, c’est le seul dossier subprimes qui soit arrivé devant un tribunal pénal dans toute l’Europe », a ainsi relevé le vice-procureur.
Or « certainement, si on était allé regarder dans les comptes de certaines banques, on aurait sans doute trouvé exactement les mêmes difficultés et le même souci de présenter les choses de manière favorable, compte tenu de l’extrême gravité de ce qui se passait à cette époque », a-t-il ajouté.
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