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Jeudi 25 mars, dans un grand hôtel de la banlieue de Kuala Lumpur, la société Top Glove se voit remettre, pour la cinquième année d’affilée, le prix de la meilleure entreprise asiatique où il fait bon travailler. « C’est la validation de nos efforts dans le domaine du capital humain », se réjouit son directeur général, Dato Lee Kim Meow. Ce n’est manifestement pas l’avis de tout le monde. Lundi 29 mars, le service américain des douanes annonçait le blocage officiel de toute importation aux Etats-Unis des produits de l’entreprise, après une enquête sur des accusations de travail forcé et de conditions de travail indignes. Malaise en Malaisie.
La société malaisienne est le numéro un mondial des gants médicaux de protection. Elle est, à ce titre, l’un des grands gagnants de la crise liée au Covid, qui a provoqué une telle demande mondiale qu’en 2020 son chiffre d’affaires a soudain été multiplié par quatre et son cours de Bourse par six. Fondée, en 1991, par Lim Wee-Chai, Malaisien d’origine chinoise, l’entreprise a conquis le quart du marché mondial et a fait de la Malaisie l’expert international de cette spécialité, grosse consommatrice du caoutchouc des plantations d’hévéas.
Dortoirs insalubres, horaires extensifs, violences…
Ce n’est pas la première fois que les douanes américaines s’intéressent à Top Glove, qui emploie 21 000 personnes dans le monde, dans 50 usines. En juillet 2020, elles avaient déjà interdit, pour les mêmes raisons, deux filiales de la société. Les organisateurs du prix de la meilleure entreprise pour travailler n’ont pas dû lire le quotidien britannique The Guardian, qui, dès 2018, a publié une longue enquête décrivant les conditions de travail des migrants népalais ou bangladais, entassés dans d’immenses dortoirs insalubres, contraints à des horaires extensifs, privés de passeport et violentés. En décembre 2020, l’épidémie de Covid-19 a contaminé 5 000 employés, dont l’un est décédé. Le ministère des ressources humaines malaisien avait lancé 19 enquêtes mettant en lumière le fait que l’entreprise ne respectait pas les règles sociales.
L’histoire de Top Glove, star de la Bourse de Kuala Lumpur, n’est pas isolée. Les mêmes douanes américaines avaient interdit, en décembre 2020, deux autres entreprises de Malaisie, FGV Holdings et Sime Darby Plantation, le numéro un mondial des palmiers à huile, également sur des accusations de travail forcé.
L’essor formidable de l’Asie du Sud en ce moment est largement construit sur le coût très faible de sa main-d’œuvre, par rapport à la Chine voisine, et sur l’appétit occidental. Mais une croissance qui repose en partie sur de l’esclavage moderne n’est pas acceptable. On espère que les douanes européennes en sont aussi convaincues que les américaines.
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