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Maurice-Ruben Hayoun : « Nous sommes en présence de deux modèles d’Etat juif »

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Tribune. En Israël, les résultats des élections se suivent et se ressemblent. Au tout début, on pouvait penser qu’il n’y avait aucune majorité disponible et qu’il ne pouvait s’agir que d’un accident de parcours, susceptible de survenir même dans les dispositifs électoraux les mieux huilés. Depuis le 24 mars, nous en sommes à quatre consultations électorales successives, dont aucune, pas même la toute dernière, ne semble éclairer un horizon bouché. En donner une explication portant exclusivement sur le système électoral ne suffit plus. En réalité, de tels résultats électoraux signent une grave crise morale de ce petit pays menacé de toutes parts. Cette division au cœur même de la société juive, sans oublier les citoyens arabes du pays, qui s’affirment de plus en plus, force à considérer de plus près les fondements mêmes de cet Etat, qui ambitionne d’être à la fois juif et démocratique.

Ce choix, cet horizon qui semble inatteignable, est d’une importance mineure par rapport à la vraie crise, laquelle découle d’un divorce entre deux piliers de cette société : les racines politico-théologiques de cette division, qui est loin de s’estomper. Les Israéliens ne parviennent pas à dégager une majorité politique stable, et cela confine à la – grave – crise existentielle. Une partie de la population semble ne plus vouloir vivre avec l’autre partie, comme un couple qui divorce tout en étant contraint de vivre encore ensemble.

Quand nous disons « raisons politico-théologiques », nous pensons que l’un (politique) s’oppose à l’autre (théologique), ce qui empêche presque de bâtir un avenir en commun, car ce que les uns souhaitent, les autres n’en veulent pas. Le débat entre ces deux bords opposés ne prend plus la forme d’une confrontation policée. Et des écarts de langage, de plus en plus fréquents, sont inquiétants, même en période électorale. Les arguments sont remplacés par des invectives.

Coercition des religieux

Trois exemples récents : le chef de l’opposition centriste (ou de gauche) a caricaturé les partis religieux en stigmatisant leur prétendue cupidité et leur insatiable envie d’accaparer les fonds publics pour leurs écoles talmudiques. De telles affirmations rappellent aux juifs du monde entier, et pas seulement d’Israël, de tristes souvenirs. Benny Gantz, pourtant réputé pour son flegme britannique, a parlé de son premier ministre en des termes très orduriers avant de se rependre et de retirer des propos aussi blessants. Mais la palme revient au chef du parti russophone, qui a dit, à peu près, qu’il fallait mettre les religieux (ses ennemis intimes) dans une brouette et aller s’en débarrasser quelque part.

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