Plus de cinq années après l’éclatement du scandale des moteurs truqués qui a ébranlé Volkswagen, le géant allemand de l’automobile réclame des comptes à deux anciens patrons emblématiques, qu’il accuse de négligence.
L’ancien président du directoire du groupe jusqu’à sa démission en 2015, Martin Winterkorn, et l’ancien patron de la filiale Audi, Rupert Stadler, congédié en 2018, se voient réclamer des « dommages et intérêts pour manquements » dans l’exercice de leurs fonctions, a indiqué vendredi Volkswagen, sans préciser les montants réclamés.
Une telle procédure doit conduire en principe à des négociations amiables entre les deux parties, qui pourraient se terminer devant un tribunal si aucun accord n’est trouvé.
Les deux hommes sont déjà visés par des procédures distinctes devant la justice pénale allemande.
– Tricherie –
Cette dernière voit en eux les principaux responsables de la tricherie du groupe aux douze marques portant sur 11 millions de véhicules diesel, pour les faire apparaître moins polluants qu’ils ne l’étaient en réalité.
Cette affaire, révélée à l’époque par les autorités américaines, a terni la réputation de l’industrie automobile du pays, qui peine toujours à se relever.
M. Winterkorn avait démissionné de son poste de patron de VW peu de temps après que le scandale ait été découvert par les autorités américaines.
Cet ingénieur sourcilleux a toujours clamé qu’il n’était au courant d’aucune malversation.
Volkswagen a aujourd’hui tiré un trait sur une grande partie du scandale avec une facture dépassant les 30 milliards d’euros, dont le plus gros a été payé aux Etats-Unis, et met le paquet sur le virage vers l’électrique.
Le conseil de surveillance de Volkswagen a lui cherché depuis 2015 à tirer l’affaire au clair et ce « sans réserve » ni « égard aux personnes » concernées, indique un courrier envoyé vendredi aux salariés du groupe et dont l’AFP a obtenu une copie.
La conclusion des recherches confiées à un cabinet d’avocats est sans appel: le conseil de surveillance de Volkswagen se dit « convaincu » que M. Winterkorn « a violé ses devoirs de diligence » en omettant, en tant que patron du groupe, « d’expliquer le contexte de l’utilisation de fonctions logicielles non autorisées » dans des moteurs diesels.
De plus, il « n’a pas veillé à ce que les questions posées par les autorités américaines reçoivent une réponse rapide, sincère et complète ».
M. Winterkorn estime lui avoir « fait tout le nécessaire » et n’avoir « rien négligé pour éviter ou réduire les dommages » entraînés par l’affaire, a-t-il répondu.
A M. Stadler, il est reproché de « ne pas s’être assuré » que deux moteurs diesel développés par Audi et utilisés dans les véhicules européens de Volkswagen, Audi et Porsche, « devaient être examinés ».
Trois autres anciens cadres, deux chez Audi et un chez Porsche, se voient aussi réclamer des dédommagements.
– Précédent Siemens –
Les tractations entre Volkswagen et les personnes incriminées vont désormais se tenir dans le but de régler le litige hors tribunal, indique un porte-parole de Volkswagen à l’AFP.
Dans le passé, le conglomérat allemand Siemens, mouillé dans un scandale de corruption de grande ampleur, avait également réclamé des indemnités à deux ex-dirigeants, Heinrich von Pierer et Klaus Kleinfeld.
Après de longues négociations, le premier avait dû verser en 2010 cinq millions d’euros à l’entreprise, et le second deux millions d’euros.
Sans lien direct avec la présente procédure, le procès pénal de M. Stadler s’est ouvert en septembre 2020. Il est le premier patron à répondre de ce scandale devant un tribunal allemand.
Le procès de M. Winterkorn a été repoussé à la mi-septembre 2021, en raison de la pandémie de Covid-19.
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