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PortraitLe chef du gouvernement arménien, arrivé au pouvoir à l’issue de la « révolution de velours » de 2018, est de plus en plus contesté. Une large partie de la population lui reproche son attitude lors de la récente guerre du Haut-Karabakh, où le pays a plié face à l’Azerbaïdjan.
Il suffit de prononcer son nom pour les voir grimacer. « Ah non, pas Nikol Pachinian, s’il vous plaît, je risque de m’énerver », prévient l’un de ses anciens partisans. « C’est devenu trop personnel pour moi, j’en viens presque à souhaiter un coup d’Etat pour qu’il parte », confesse une autre. « Il nous a tellement déçus », soupire un troisième.
Lorsqu’on les interroge sur le premier ministre arménien, les réactions de ses ex-collaborateurs ou anciens soutiens sont souvent les mêmes. En général, un long silence accablé s’ensuit, puis les reproches déferlent, innombrables et désordonnés. « Quand on commence à faire la liste des ratés, on ne sait plus où s’arrêter », s’excuse l’un d’eux après avoir énuméré ses griefs.
Hier héros de la « révolution de velours », le mouvement pacifique qui l’a porté au pouvoir en 2018 pour chasser une élite postsoviétique corrompue, Nikol Pachinian, 45 ans, est devenu, à leurs yeux, le symbole d’une Arménie vaincue et humiliée après la lourde défaite face à l’Azerbaïdjan dans la guerre du Haut-Karabakh.
Absence d’alternative politique
La population ne lui pardonne pas d’avoir signé le cessez-le-feu du 9 novembre 2020 consacrant d’importantes pertes territoriales, ni les quelque 3 500 soldats morts au front, souvent très jeunes. Quatre mois après la fin du conflit, des dizaines de familles attendent encore des nouvelles de leurs proches, disparus sur le champ de bataille, 74 prisonniers sont toujours aux mains de Bakou, des milliers d’habitants du Haut-Karabakh et des territoires entourant l’enclave ont été chassés de chez eux, tandis qu’une crise économique frappe le pays. Assommés, hagards, les trois millions d’Arméniens peinent à comprendre comment ils en sont arrivés là.
Pendant la guerre, Nikol Pachinian leur avait pourtant assuré que la victoire était proche. Ils ont compris trop tard qu’il n’en était rien et que ses discours triomphalistes étaient sans rapport avec la réalité des combats.
Alors, depuis, le même message revient en boucle : « Nikol est un traître et doit partir. » L’opposition le martèle à chacune des manifestations organisées à Erevan. D’autres l’ont fait leur au fil des mois. Le président, l’Eglise, puis l’armée ont réclamé tour à tour sa démission et la tenue d’élections anticipées.
Acculé, Nikol Pachinian – il n’a pas donné suite aux demandes d’entretien du Monde – résiste et table sur le soutien de son socle de partisans, réduit mais fidèle. Selon les estimations, ils représenteraient 20 % de la population. Une proportion non négligeable qui permet au premier ministre, accusé de privilégier la loyauté de son entourage à sa compétence, de rester confiant en perspective des élections anticipées, prévues le 20 juin. Il sait que l’absence d’alternative politique joue en sa faveur : l’opposition, associée à l’ancien régime, honni, est si faible et discréditée que les sondages le donnent encore vainqueur.
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