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En Russie, le monde académique craint une mainmise accrue de l’Etat

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A l’Université d’Etat de Moscou, le 8 février 2021. A l’Université d’Etat de Moscou, le 8 février 2021.

Ce ne sont que quelques amendements dans une loi sur l’éducation imposante et déjà ancienne. Mais ils suffisent à provoquer une émotion inédite dans la communauté éducative et scientifique russe, qui craint de voir l’Etat resserrer son contrôle sur le monde académique et l’enseignement.

Le point de départ paraît lui aussi anodin : « Le gouvernement de la Fédération de Russie fixe les modalités, le contrôle et les formes de la mise en œuvre des activités éducatives », annonce le texte. Mais dans le détail, les amendements adoptés permettent de soumettre toute activité éducative à une validation préalable des autorités, dont les modalités ne sont pas définies.

Ces « activités éducatives » dépassent largement le champ de l’école ou de l’université. Sont concernées celles « visant à diffuser des connaissances, de l’expérience, des attitudes, des valeurs… » Soit les conférences, visites guidées, cours de langue, cours sur YouTube, programmes de formation – autant d’activités qui connaissent un essor très important en Russie. En théorie, l’éducation des enfants pourrait aussi être concernée. Un site de ventes en ligne a de manière préventive gelé la vente de livres électroniques et de cours en ligne.

« Les institutions s’autocensurent »

« La loi n’est pas encore entrée en vigueur et elle produit déjà des effets, constate Sergueï Popov, astrophysicien et membre de l’Académie des sciences, qui a initié une pétition contre le texte. Les institutions actives dans la vulgarisation scientifique craignent l’excès de bureaucratie, ou de se retrouver hors des clous. Et elles s’autocensurent. »

Les nouveaux amendements, définitivement adoptés le 16 mars par la Douma et qui doivent désormais être signés par Vladimir Poutine, prévoient aussi de soumettre les contacts entre scientifiques russes et étrangers à un contrôle qui n’existait pas auparavant – toutes les coopérations internationales, recherches communes, accueils d’étudiants ou d’enseignants doivent ainsi recevoir l’agrément du gouvernement. « Là aussi, la tendance est la même, assure Sergueï Popov. Plus personne n’ose prévoir d’inviter des collègues étrangers, et l’isolement de la Russie sur la scène scientifique va encore se renforcer. »

Fait inhabituel et signe d’un malaise, la loi a été adoptée en troisième lecture avec les seules voix de Russie unie. Le Parti communiste et les nationalistes du LDPR, quasiment toujours alignés, ont voté contre. Depuis sa présentation, plusieurs pétitions ont été lancées. La principale, lancée par Sergueï Popov, a recueilli plus de 240 000 signatures, un chiffre inédit pour un sujet aussi spécifique.

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