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Qui a dit que Margrethe Vestager refusait toujours à la création de « champions européens », au nom de la défense de la concurrence, et donc des consommateurs ? A l’issue d’un an d’enquête, la vice-présidente exécutive de la Commission a autorisé, mardi 23 mars, le rachat du groupe néerlandais GrandVision, propriétaire des chaînes GrandOptical, Générale d’optique et Solaris, par EssilorLuxottica, une opération à 7,2 milliards d’euros, lancée en juillet 2019. Le géant franco-italien devra juste céder 351 magasins sur 7 000 (Italie, Pays-Bas et Belgique) pour ne pas écraser le marché.
Pour quelques refus retentissants au cours des vingt dernières années (General Electric-Honeywell, Legrand-Schneider, Alstom-Siemens, Tata-ThyssenKrupp…), Bruxelles a accepté des milliers de mariages en échange des « remèdes » antitrust. L’un des derniers en date est celui du canadien Bombardier et du français Alstom, qui a donné naissance au numéro deux mondial de la construction ferroviaire. Le prochain pourrait être Veolia-Suez, dans le secteur du traitement de l’eau et des déchets.
Le paysage économique a changé
Qu’on le veuille ou non, la commissaire danoise était jusqu’à présent tenue par le rigoureux droit de la concurrence, pilier d’une Europe qui est davantage celle des consommateurs que des citoyens. Reconduite fin 2019, la vice-présidente exécutive de la Commission s’est engagée à « actualiser » les règles antitrust, poussée par Paris et Berlin, qui avaient peu goûté son veto à la fusion Alstom-Siemens, destinée à créer un acteur de poids face à l’appétit du géant chinois CRRC.
Depuis le règlement de 2004 en faveur d’une concurrence libre et non faussée, le paysage économique a pourtant changé. Sur la notion de « marché pertinent », d’abord. Celui-ci doit tenir compte de la montée en puissance de groupes de taille mondiale, notamment chinois, peu respectueux des contraintes imposées aux Européens sur les aides d’Etat et les concentrations. Ce que la France et l’Allemagne avaient souligné dans le cas Alstom-Siemens, même si le concurrent asiatique ne représentait pas encore une menace immédiate.
Sur la numérisation croissante des activités, ensuite. Dans l’économie numérique, mesurer la concurrence à l’aune des prix aux consommateurs ne suffit plus, quand des entreprises se rémunèrent aussi sur les données collectées et profitent de puissants effets de réseau. Mais là, Mme Vestager n’a pas de leçons à recevoir : elle reste la bête noire des géants américains du numérique, qu’elle a condamnés à de lourdes amendes.
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