La Norvège a annoncé mardi qu’elle bloquerait un projet de cession par Rolls-Royce d’un producteur norvégien de moteurs pour bateaux à un groupe russe, de peur que la Russie ne mette la main sur des technologies sensibles.
Membre de l’Otan, le pays nordique avait exigé il y a deux semaines une suspension temporaire de la cession de Bergen Engines par le motoriste britannique, le temps d’examiner l’impact de l’opération sur sa sécurité nationale.
« Nous disposons de suffisamment d’informations pour conclure qu’il est absolument nécessaire d’empêcher la vente de l’entreprise à une entreprise contrôlée depuis un pays avec lequel nous n’avons pas de coopération en matière de sécurité », a estimé la ministre de la Justice et de la Sécurité publique, Monica Maeland, mardi.
Dans le giron de Rolls Royce depuis 1999, Bergen Engines fournit et entretient des moteurs pour des bâtiments de plusieurs marines de l’Otan, y compris pour le très secret navire espion norvégien Marjata, selon les médias locaux. Le groupe a réalisé en 2019 un chiffre d’affaires de 279 millions d’euros avec 950 employés.
Dans un communiqué, le gouvernement norvégien explique notamment que « la technologie dont dispose Bergen Engines et les moteurs qu’elle fabrique auraient une grande portée stratégique militaire pour la Russie ».
« Cela aurait renforcé les capacités militaires de la Russie d’une manière qui serait clairement contraire aux intérêts de la politique de sécurité norvégienne et alliée », a-t-il fait valoir.
Ce blocage risque de mal passer à Moscou. Le 9 mars, lors de l’annonce de la suspension de la transaction, l’ambassade de Russie à Oslo avait dénoncé les « implications antirusses » de la décision.
L’acquéreur pressenti, TMH, une entreprise privée ayant son siège en Russie, s’est dit « très déçu », assurant qu’il aurait été prêt à des solutions garantissant les contrats navals en cours et le contrôle sur les exportations.
« Nous allons maintenant passer en revue toutes les implications commerciales, financières et juridiques (…) de la décision du gouvernement norvégien », a-t-il indiqué dans une déclaration à l’AFP.
Spécialiste de l’ingénierie des transports et important fournisseur de matériel roulant ferroviaire, TMH compte quelque 100.000 salariés sur 25 sites à travers le monde.
La vente d’un montant de 150 millions d’euros devait faire partie du vaste programme de cessions d’actifs (2 milliards de livres) annoncé l’été dernier par Rolls-Royce pour solidifier ses finances d’ici début 2022.
Le britannique a dit mardi maintenir cet objectif.
« L’annonce d’aujourd’hui va créer d’importantes incertitudes au sein de Bergen Engines », a-t-il toutefois réagi dans un communiqué. « Nous solliciterons l’aide du gouvernement norvégien pour trouver rapidement une autre option ».
La Norvège, qui partage une frontière avec la Russie dans le Grand Nord, entretient avec son voisin des relations traditionnellement cordiales mais celles-ci se sont dégradées après l’invasion russe de la Crimée en 2014.
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