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Publié le : 20/03/2021 – 16:36
Avec le Brexit, le Royaume-Uni a aussi mis fin au programme d’échange universitaire Erasmus, fruit d’une collaboration fructueuse qui remonte à 1987. L’exécutif britannique l’a remplacé par le programme Alan Turing. Mais ce dernier peine à convaincre.
Good bye Erasmus. Le programme d’échange universitaire européen auquel participait le Royaume-Uni depuis 1987 a cédé la place, le 12 mars dernier, au programme Alan Turing, du nom du célèbre mathématicien britannique. Mais le nouveau programme d’étude britannique se révèle moins génial que le nom de son illustre personnage.
« The Independant » a été le premier journal britannique à tirer à boulet rouge sur la nouvelle formule plébiscitée par Boris Johnson. Présenté par le Premier ministre britannique comme un « fantastique » système permettant un « nivellement par le haut » en aidant 35 000 étudiants à voyager, le nouveau programme ne couvre en réalité « ni les frais de scolarité, ni les frais de voyage, ni les frais de subsistance », assure le quotidien. Rien d’étonnant quand on sait que le budget alloué à Turing pèse 100 millions de livres (soit plus de 120 millions d’euros). À titre de comparaison, le budget d’Erasmus s’est élevé à 3, 37 milliards d’euros en 2019.
Ce refus de continuer le programme #Erasmus me passe pas. Rien ne justifie ça. Surtout que c’est bien l’une des seules grandes réussites de l’Union Européenne
Ils ont plus d’étudiants que de pêcheurs. Encore et toujours la jeunesse qui paie#BrexitDeal https://t.co/DipreQN7a9— ?. (@G_Kl35) December 24, 2020
Un faible budget
En décembre dernier, Boris Johnson n’avait pourtant rien caché de son intention de faire des économies dans ce domaine. Après avoir un temps promis que le Royaume-Uni resterait au sein du programme Erasmus, il avait justifié sa volte-face en décembre dernier en avançant que le programme coûterait trop « cher » aux caisses de l’État. Il faut dire que le royaume accueillait jusque-là environ 150 000 Européens chaque année dans ses universités, alors que « seulement » 17 000 Britanniques participaient au programme.
Faute de moyen, les étudiants anglais ne percevront donc que 490 livres (570 euros) contre 630 livres (736 euros) avec Erasmus, rapporte de son côté The Herald, à Glasgow. Et les frais de scolarité ne seront plus couverts alors que les cours étaient gratuits avec Erasmus. Enfin, Turing ne prévoit plus la somme de jusqu’à 1 315 livres [1 520 euros] allouée aux frais de voyage, sauf pour les étudiants issus de milieux défavorisés.
Les jeunes britanniques ne sont pas les seuls à être lésés. De l’autre côté de la Manche, les étudiants européens devront désormais s’acquitter des frais de scolarité réservés aux étudiants étrangers et les démarches risquent, elles aussi, de se compliquer.
Le programme Alan Turing, fruit du « Global Britain »
Au-delà de l’aspect financier, « c’est surtout un gâchis considérable, se désole Charlotte Gould, maîtresse de conférences en civilisation, art et culture du Royaume-Uni, dans un entretien accordé à France 24. En mettant fin à Erasmus, Boris Johnson a détruit un long travail établi au fil des ans de collaboration fructueuses entre universités, enseignants et étudiants. À court terme, ce sont surtout des diplômes et des cursus axés sur les langues qui sont amenés à disparaître. »
Pour l’angliciste, il est d’ailleurs faux de prétendre que le programme Alan Turing remplace Erasmus. « Le programme européen repose sur une philosophie d’échange et de réciprocité, quand Alan Turing n’est basé que sur une recherche de retour sur investissement. C’est un programme mondial qui va peu à peu délaisser l’Union européenne pour les États-Unis et l’Australie dans le but de renforcer des partenariats commerciaux. Le programme s’inscrit pleinement dans la logique de l’exécutif du ‘Global Britain’, qui donne toute priorité au Royaume-Uni. »
« Tout reconstruire »
Une lueur d’espoir tout de même. « On peut espérer que les liens noués au fils des années entre les universités se perpétuent et que les facultés britanniques qui disposent de leur propre budget puissent perpétuer les échanges. Mais en attendant de telles perspectives, on est face à un champ de ruines, il faut tout reconstruire. »
Tout n’est pas perdu non plus pour les étudiants nord-irlandais. Contrairement aux Anglais, Écossais et Gallois, ils vont pouvoir se maintenir au sein du programme européen car le gouvernement de Dublin a annoncé qu’il participera à hauteur de 2,1 millions d’euros par an.
Ironie du sort, si Alan Turing, né de mère irlandaise, avait été étudiant aujourd’hui, il aurait pu participer au programme Erasmus et voyager à l’étranger sans difficulté.
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