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Le bâtiment décrépi est planté au milieu du complexe minier de Cukaru Peki, en construction près de Bor. Du linge sèche dans un terrain boueux devant la porte. L’entrée recouverte de poussière de cuivre rouge mène à une cantine rudimentaire, où une Chinoise s’active aux fourneaux. A l’étage, les dortoirs sont un vaste bazar miteux, à peine chauffés. Un Chinois, qui refuse de donner son nom et sa fonction, demande de quitter les lieux : « Les échanges avec les étrangers sont interdits par la direction. »
Cette visite impromptue permet de constater les terribles conditions d’hébergement de certains ouvriers chinois embauchés par Zijin, ce géant qui a racheté, en 2018, ce filon de cuivre situé dans l’est de la Serbie. Pour creuser la terre, Zijin a fait venir des centaines de travailleurs de l’empire du Milieu. Le 14 janvier, plusieurs dizaines de salariés de Jinshan Construction, une société sous-traitante, ont lancé un mouvement inédit en se mettant en grève. Ils se sont filmés et ont réussi à faire parvenir leurs vidéos à un site d’information local, poussant BIRN, un média d’investigation serbe, à enquêter sur leur histoire.
« Traitez-nous comme des êtres humains ! », réclament des ouvriers à leurs supérieurs chinois sur ces vidéos. Ils se plaignent notamment de la façon dont leur direction a réagi face aux cas de Covid-19 qui se multipliaient alors, et aux « heures supplémentaires non payées ». Dans un communiqué, Jinshan Construction a rétorqué que cette grève était menée par « des employés secoués par l’apparition de quelques cas positifs », et assuré que « les ouvriers [étaient] dûment rémunérés ». « Les mauvaises conditions que montrent ces vidéos ne sont pas imputables à Jinshan », a souligné l’entreprise.
No man’s land
Les grévistes avaient pourtant filmé les dortoirs visités par Le Monde. Un mois et demi plus tard, malgré les promesses de Jinshan de rapatrier des employés, nombre d’entre eux affirment être toujours bloqués en Serbie. « Nous sommes plusieurs centaines, qui travaillons onze heures par jour pour 8 400 yuans [1 085 euros] par mois. Notre labeur quotidien est sale et fatigant. Les salaires n’arrivent jamais à l’heure, et nos conditions de vie sont inacceptables. La direction et nos supérieurs nous menacent aussi souvent », assure au Monde l’un d’eux. Ce dernier, arrivé début 2020 en Serbie pour un contrat d’un an, n’a pas pu repartir à la date prévue en raison de l’épidémie.
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