L’espace d’un instant, la langue du président de la Métropole de Lyon semble fourcher entre RSA et RSJ. La scène se déroule le 11 mars à la Maison Lyon pour l’Emploi, à un jet de pierre de l’Hôtel de la Métropole. Bruno Bernard est venu y prendre le pouls des jeunes en recherche d’emploi et dévoiler son projet de Revenu de solidarité jeune (RSJ), déclinaison locale du controversé RSA Jeune. La visite des installations se fait au pas de charge. « Quelles évolutions vous voyez depuis un an? » interroge l’élu EELV. « Les jeunes sont motivés à trouver un emploi, mais certains n’ont pas travaillé depuis longtemps, et les embauches sont difficiles », répondent les fonctionnaires. Un rapide tour des locaux et un bref échange avec les jeunes en recherche d’emploi plus tard, Bruno Bernard est prêt à présenter le plan de chantier de son revenu solidaire.
D’abord, il y a un constat. « 22.6% des moins de 30 ans de la métropole vivent sous le seuil de pauvreté », chiffre Séverine Hémain, vice-présidente à la Métropole en charge de l’insertion et de l’emploi, se basant sur une étude de l’agence d’urbanisme de Lyon réalisée à l’été 2020. Une statistique amplifiée par la crise sanitaire et sociale que traverse le pays. La caisse d’allocation
Une allocation mensuelle de 300 à 400 euros
Pour venir en aide à ces jeunes précaires, les écologistes à la manœuvre du Grand-Lyon vont déployer un dispositif en trois volets: une allocation, un accompagnement, et une action spécifique pour lever les freins à la réinsertion. Pour y accéder, les candidats doivent être âgés de 18 à 24 ans, résider dans la Métropole depuis six mois minimum, ne rentrer dans aucun dispositif déjà existant (RSA, allocation aux adultes handicapés, garantie jeune, etc.), gagner moins de 400 euros par mois, ne pas bénéficier d’un soutien financier des parents ou d’un tiers, et être sortie du système éducatif. Les postulants recevront une allocation de 400 euros, qui tombera à 300 euros s’ils disposent d’une autre ressource financière. Objectif des écologistes: atteindre 2.000 jeunes en grande précarité sur les 59 communes que compte la Métropole.
Bruno Bernard, le président de la Métropole de Lyon, échange avec de jeunes demandeurs d’emplois le 11 mars 2021 à Lyon (crédit photo: Moran Kerinec).
Le tempo sera essentiel pour les ramener sur les sentiers de la réinsertion. L’expérimentation aura une durée maximale de deux ans par participant, avec un renouvellement de contrat tous les trois mois. Les premiers temps seront dédiés à stabiliser les parcours de vie difficiles. « S’engager dans une démarche de recherche d’emploi est compliqué quand on ne sait pas où dormir ou si l’on va manger », pointe Camille Augey, adjointe à l’Économie solidaire à la ville de Lyon et présidente de la Mission Locale. Une fois leur logement sécurisé, les agents des missions locales mèneront un suivi personnalisé selon les profils. « Les conseillers emploi-formation ont l’expertise pour un diagnostic puis les accompagner, explique Camille Augey. Cela permet un ensemble de propositions pour aider les jeunes à surmonter leurs difficultés: simulation d’entretiens, écriture de lettre de motivation, recherche d’emploi… »
Les étudiants exclus du dispositif
Toucher un public qui ne touche pas d’aide, voilà le pari des écologistes. « Nous avons un engagement positif des associations qui vont nous permettre d’aller toucher des jeunes dits invisibles », assure Séverine Hémain. Comment trouver ces précaires en périphérie de l’aide sociale ordinaire? La vice-présidente compte sur les maraudes pour rencontrer les jeunes qui ne franchissent pas les portes des missions locales. Pourtant aussi touchés par la crise, les étudiants sont exclus du programme. « Ce dispositif s’adresse à un public qui n’a le droit à aucune aide, ce qui n’est pas leur cas », souligne l’élue. « Le RSJ ne concurrence pas d’autres dispositifs, il les complète », martèlent d’une même voix ses collègues écologistes.
Une fois acté lors du conseil métropolitain ce lundi 15 mars, les dossiers pourront être déposés en mai, et les premiers versements effectués à partir de juin. Pour cette première année d’expérimentation, la Métropole a débloqué une enveloppe de 10 millions d’euros. Avec quel horizon? « J’espère que cette expérience durera le moins longtemps possible, botte en touche Bruno Bernard, ça durera un an, deux ans, dix ans… J’espère qu’il y aura moins de trous dans la raquette dans les années qui viennent. »
Derrière ce dispositif se distinguent déjà les élections de 2022, en ligne de mire des écologistes. Les élus lyonnais espèrent imposer le revenu de solidarité jeune au cœur des débats et faire de cette expérimentation une preuve de leur capacité à diriger. « Dès le mois de juillet 2020, nous avons demandé au gouvernement d’expérimenter le RSA jeune », rappelle Bruno Bernard. Las d’une réponse gouvernementale, l’exécutif métropolitain a lancé sa propre démonstration. « La garantie jeune du gouvernement fonctionne, mais elle touche moins de 10% des jeunes visés: donc 90% restent hors dispositif. Leur volonté de doubler le dispositif est une bonne chose, mais reste insuffisante », estime l’écologiste, qui lui préfèrerait le RSA jeune lui brûlant les lèvres.
]
L’article La Métropole de Lyon teste une déclinaison du RSA Jeune est apparu en premier sur zimo news.