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Centrafrique : sur le tournage de « Bangui, unité spéciale », la nouvelle série policière

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La réalisatrice Elvire Adjamonsi (à droite) observe la mise en place de la première scène de la série « Bangui, unité spéciale », dont le tournage a démarré le 11 mars. La réalisatrice Elvire Adjamonsi (à droite) observe la mise en place de la première scène de la série « Bangui, unité spéciale », dont le tournage a démarré le 11 mars.

Le premier assistant l’exige : les fruits doivent être imposants et dépasser du panier. Sans cet accessoire, assure-t-il, la première scène du premier épisode de la série Bangui, unité spéciale manquerait de couleur. Résignée, la réalisatrice, Elvire Adjamonsi, file se procurer les précieuses denrées au marché local. En l’attendant, l’équipe s’affaire dans la petite cour d’une maison du quartier populaire de Goboungo. Un technicien prépare du faux sang en mélangeant du miel avec divers colorants. L’illusion est parfaite.

Consacrée au quotidien d’une unité de police dédiée à la lutte contre les crimes sexuels en Centrafrique, la série comptera dix épisodes de 52 minutes chacun. Pour les boucler, les producteurs disposent d’un budget total de 500 000 euros, en partie subventionné par l’Union européenne et l’Organisation internationale de la francophonie. Un projet ambitieux qu’Elvire Adjamonsi a porté pendant plusieurs années.

La réalisatrice, Béninoise de naissance, connaît bien la Centrafrique : elle a travaillé au début des années 2000 en tant qu’administratrice du centre culturel Linga Tere, dans le quartier de Galabadja, à Bangui, avant de partir de peur des violences en 2004. En 2010-2011, elle est à Abidjan, en Côte d’Ivoire, en pleine crise post-électorale. C’est là qu’elle prend conscience de la problématique des crimes sexuels qui, une fois la guerre terminée, continuent de se propager dans la société. Devenue réalisatrice de cinéma, et après la sortie de son premier long métrage, Sessi, elle décide de revenir en Centrafrique en 2017 et y tourne un documentaire autour des victimes de la guerre civile.

Le centre Linga Tere transformé en plateau

« Dans la bouche de jeunes filles, âgées parfois de 11 ou 15 ans, j’ai pu entendre : “Nous sommes leurs esclaves sexuels”. Alors je me suis dit : « Pourquoi ne pas en parler ici, de telle sorte que tout le monde puisse écouter cette parole, l’entendre ? », raconte-t-elle. Pour faire passer le message, le format de la série est le mode de narration idéal, estime la réalisatrice

Elle-même est « fan absolue de film policiers, qu’ils soient français, américains ou même africains ». Pour les besoins du tournage, le centre Linga Tere a été transformé en plateau. L’espace doit accueillir les locaux fictionnels de la police. Déjà, le portail affiche « Unité spéciale des victimes » en grandes lettres blanches sur fond bleu. La peinture de la salle d’interrogatoire finit de sécher. Il faut convertir la bibliothèque en salle de réunion pour les inspecteurs.

Elvire Adjamonsi aimerait aller à l’intérieur du pays, aux chutes de Boali ou dans la réserve de Bayanga, mais la situation sécuritaire est délicate. Depuis la mi-décembre, une nouvelle coalition de groupe armés a créé des troubles à l’intérieur du pays. Une attaque sur la capitale a été repoussée le 13 janvier. La situation a semblé s’éclaircir depuis, avec la reprise de la plupart des villes par les forces centrafricaines et leurs alliés. Mais le pays est toujours sous état d’urgence et soumis à un couvre-feu à 20 heures, que l’équipe est tenue de respecter.

« Nous avons de très bonnes relations avec les autorités, précise Elvire. La police nous a garanti qu’elle était prête à nous accompagner, et nous avons même des policiers parmi les figurants. » L’unité de police de la fiction s’inspire d’ailleurs largement d’une vraie institution nationale, l’Unité mixte d’intervention rapide et de répression des violences sexuelles faites aux femmes et aux enfants (Umirr).

L’inspectrice Régine, « une héroïne froide »

Si le noyau dur de l’équipe provient du Congo-Brazzaville, de Côte d’Ivoire ou encore du Cameroun, une bonne partie des techniciens sont centrafricains. L’un des objectifs de la série, est d’ailleurs de pouvoir asseoir une équipe locale, qui pourra continuer à travailler ici de façon autonome. Les acteurs aussi ont pratiquement tous été recrutés à Bangui.

Pour certains, ce sera d’ailleurs une première, comme Valentina Kpekabou, qui tient pourtant le rôle de l’actrice principale, l’inspectrice principale Régine. « C’est une héroïne froide, vraiment dure, qui laisse peu de place aux sentiments. Complètement le contraire de moi, qui suis plutôt expansive », sourit l’actrice, qui ne semble nullement stressée par le poids qui pèse sur ses épaules.

« La petite sœur de Régine a disparu et l’inspectrice tente de se racheter en retrouvant les auteurs des crimes sexuels », poursuit Valentina Kpekabou. L’actrice a immédiatement été séduite par le scénario. « C’est vraiment l’un de mes combats aujourd’hui, nous nous battons pour que la femme aille de l’avant. Je pense que le cinéma, par rapport à la crise que nous avons traversé, est un facteur de développement. »

Dans le premier épisode de la série, une jeune bonne est retrouvée assassinée. Sur le plateau déployé à Gobongo, l’assistant réalisateur demande le silence. La mère de la jeune femme entre dans le salon, s’assied et pose son panier rempli de légumes et de fruits. Elle appelle sa fille. Le clap retentit : « Bangui, unité spéciale, épisode 1, première ! »

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