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Ligue des champions : Pochettino, l’homme qui aimait Barcelone et détestait le Barça

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Mauricio Pochettino, l’entraîneur du PSG, a été joueur et entraîneur de l’Espanyol, l’autre club de la ville de Barcelone. Une équipe dont il est devenu une légende. Rétrospective des années barcelonaises de l’Argentin à quelques heures du huitième de finale retour entre Paris et le Barça.

Lorsqu’il a été officialisé sur le banc du PSG en lieu et place de Thomas Tuchel, Mauricio Pochettino s’est vu confier la même mission que ses prédécesseurs : permettre à Paris de soulever le trophée de la Ligue des champions. Premier obstacle sur son chemin : le Barça. Une équipe que « Poche » connaît bien pour avoir été longtemps un joueur puis l’entraîneur de l’Espanyol Barcelone, l’autre grand club de la capitale catalane et grand rival local des « Cules ».

La victoire et l’état d’esprit affiché par le PSG au Camp Nou le 16 février ont dû fortement réjouir le technicien argentin de 39 ans, lui qui a passé ses meilleurs années à se transcender contre ce même Barça.

« Il laissait sa peau sur le terrain dans ces matches là », se souvient Robert Hernando, directeur de La Contra Deportiva, un site consacré à l’actualité de l’Espanyol, dans les colonnes de l’Équipe. « Il y a peu de choses qu’un Perico (une « perruche », surnom des supporters de l’Espanyol, ndlr) aime plus que battre le Barça et il le savait ».

Mauricio Pochettino a tout connu avec l’Espanyol

Jeune star des Newell’s Old Boys de Rosario en Argentine, Mauricio Pochettino est transféré en 1994 à l’Espanyol Barcelone. À 22 ans, il découvre ainsi le Vieux continent et le championnat espagnol.

« Mauricio Pochettino est arrivé à l’Espanyol à l’été 94, un été important pour le club puisqu’on venait de remonter en première division. Avec Branko Bronic et Florin Raducioiu, il va constituer la colonne vertébrale de l’équipe qui se qualifiera deux ans plus tard pour la coupe d’Europe », recontextualise, Jordi Luego, directeur de la rédaction de La Grada, média consacré à l’Espanyol Barcelone, joint par France 24. « Malgré son jeune âge, il s’impose comme un des leaders de l’équipe. Dès sa première saison, il est titularisé 34 fois formant une belle charnière centrale avec Sebastian Herrera. »

« Il a été le chef de la défense de l’Espanyol pendant tout son passage au club. Il était impitoyable, dur au mal et c’était le relais de l’entraîneur sur le terrain », se remémore le journaliste catalan, lui-même fan de l’équipe

Le 9 février 1997, l’Espanyol Barcelone reçoit le voisin Blaugrana pour un derby. À l’issue d’un match héroïque, les bleus et blancs s’imposent pour la première fois depuis dix ans contre leur grand rival.

Ses accrochages avec la star blaugrana, Luis Figo, le font entrer un peu plus dans le cœur des supporters de l’Espanyol. « Mauricio lui mettait des coups de crampons, mais avec beaucoup d’élégance et de subtilité, avant de le relever avec une main derrière le dos comme s’il n’avait rien fait », se souvient avec le sourire Robert Hernando.

Mauricio Pochettino défendant sur Nicolas Anelka le 12 avril 2000.
Mauricio Pochettino défendant sur Nicolas Anelka le 12 avril 2000.
Mauricio Pochettino défendant sur Nicolas Anelka le 12 avril 2000. © Christophe Simon AFP

 

C’est la dernière victoire de l’Espanyol face au Barça à l’Estadio de Sarriá, son stade historique qui sera démoli quelques mois plus tard. Un évènement qui marque profondément « Poche ». Preuve d’une relation indéfectible entre l’Espanyol et lui, la veille de la destruction, il demande au gardien de le laisser entrer dans ce stade qui l’a vu naître en tant que joueur. « Je n’ai pu contenir mes larmes », avoue-t-il dans sa biographie.

Après 60 années de disette, l’Espanyol de Barcelone soulève enfin un trophée grâce au leadership de Mauricio Pochettino : une victoire 2 à 1 en Copa del Rey contre l’Atlético de Madrid remporté « au courage », qui reste aujourd’hui l’un des meilleurs souvenirs de Jordi Luengo.

En difficultés financières, le club barcelonais doit cependant se résoudre à céder son défenseur central à l’hiver 2001. Direction le PSG pour « Poche » pour deux ans et demi.  Mais l’Argentin rentre vite au bercail quand Luis Fernandez, qu’il a cotoyé au PSG, reprend les rênes du club catalan et lui demande de revenir sauver l’Espanyol.

Un retour pour sauver le club

Luis Fernandes évoquait ce choix lors d’une interview fin 2020 : « Dans un groupe, il te faut (…) un leader dans l’état d’esprit, celui qui peut rassembler des gens autour de toi. Et, en arrivant à l’Espanyol, c’est ce qui m’a semblé être la bonne solution avec Mauricio », explique-t-il.

Le club est alors au bord de la relégation. Mais, encore une fois, le leadership de Pochettino va faire des miracles. Le club se sauve et retrouve une bonne dynamique, en s’offrant même une nouvelle Coupe du roi en 2006 et une finale de C3 en 2007. Sans « Poche » toutefois, la légende ayant raccroché ses crampons à l’issue de la saison 2005/2006 lors d’une conférence de presse larmoyante :

« Je crois que j’ai pleuré car j’ai vu mon fils pleurer. Ou peut-être pas. J’ai pleuré parce que j’ai pleuré. J’ai dû sortir de la salle pour prendre l’air », raconte-t-il dans son autobiographie.

Maurico Pochettino en larmes juste après sa retraite sportive le 15 septembre 2006.
Maurico Pochettino en larmes juste après sa retraite sportive le 15 septembre 2006.
Maurico Pochettino en larmes juste après sa retraite sportive le 15 septembre 2006. © Josep Lago, AFP

Avec 304 matches, Il reste à ce jour le joueur étranger qui a porté le maillot bleu et blanc le plus souvent et l’un des rares à avoir qualifié le club trois fois pour la coupe d’Europe.

De joueur à entraîneur

Mais l’histoire d’amour ne s’arrête pas là. Pochettino ne s’éloigne pas du club malgré sa retraite sportive. Il commence à coacher l’équipe féminine. Puis, en 2009, le bon soldat est une nouvelle fois appelé au secours d’un club une nouvelle fois au bord de la relégation.

« Le président de l’époque Dani Sánchez Llibre s’est alors entretenu avec Pochettino qui lui a affirmé qu’il pouvait renverser la situation », raconte Jordi Luengo directeur de la rédaction de La Grada.

Pour son premier match en tant qu’entraîneur, en 2009, « Poche » et ses troupes arrachent un nul héroïque (0-0) au Camp Nou en coupe. Quelques semaines plus tard, ils viennent arracher ce qui reste encore aujourd’hui la dernière victoire de l’Espanyol chez l’ennemi juré. Une victoire 2 à 1, avec un doublé d’Ivan de la Peña, ami de longue date du coach Pochettino face à un Barça à son apogée et prêt à signer un sextuplé historique sous la houlette de Messi et Guardiola.

« Malgré tout, après la 28e journée, la situation semblait encore plus désespérée. La sortie de la zone de relégation était à 8 points. Mais derrière, l’équipe réalise l’impossible et empoche 25 points sur 30 possibles », continue le journaliste catalan Jordi Luengo.

« En tant qu’entraîneur, ma plus grande joie a été lorsque nous nous sommes sauvés à Almeria, lors de ma première saison », confie volontiers Pochettino

>> À lire aussi : Mauricio Pochettino, un « shérif » pour relancer la machine PSG

En débarquant sur le banc de son club de cœur, l’Argentin se fait le chantre de la nouveauté, imposant de nouvelles méthodes et tentant de rapprocher au maximum les joueurs du public. Plusieurs anecdotes résument le personnage : au lieu de se barricader pour ses entraînements, Pochettino avait l’habitude d’emmener ses joueurs courir dans la montagne environnante à la vue de tous. Et quand six de ses joueurs se font attraper pour une sortie en discothèque, il leur inflige en guise de punition de régler de leur poche les 37 bus de supporters qui devaient les accompagner à Villareal.

Plutôt retourner dans sa ferme que d’entraîner le Barça

Alors qu’il aurait souhaité devenir le « Alex Ferguson de l’Espanyol Barcelone », une référence à l’entraîneur mythique de Manchester United resté 27 ans aux commande du club, une série de défaite et une place de lanterne rouge lui coûte sa place en 2012.

Il rebondit ensuite à Southampton, puis au Tottenham Hotspurs qu’il mènera en finale de Ligue des champions. Un solide CV qui lui vaut des rumeurs le voyant reprendre le Barça. Il a immédiatement coupé court lors d’une conférence de presse

« Je n’entraînerai jamais le Barça ou Arsenal car je suis lié à l’Espanyol et à Tottenham », explique-t-il « Je préfère retourner dans ma ferme plutôt que d’entraîner ces clubs. »

Mauricio Pochettino conserve tout de même des liens privilégiés avec Barcelone et garde un appartement dans le quartier de l’Espanyol situé dans les hauteurs de la ville, où il aime revenir passer ses vacances avec ses fils, qui ont tous deux vu le jour dans la cité catalane. D’ailleurs, ils aiment rappeler à qui veut l’entendre que ses deux enfants ont grandi avec des pyjamas de l’Espanyol.

Désormais à Paris, sa personnalité semble faire l’unanimité et avoir fédéré les joueurs. Comme l’illustre cette anecdote que Pochettino a racontée après le match aller contre le FC Barcelone à propos du « cadeau » que lui a offert Mbappé.

« Kylian se sentait bien avant le match. À l’entraînement, il m’a demandé : ‘Combien de fois as-tu gagné au Camp Nou ?’. Je lui ai répondu ‘une fois’ avec l’Espanyol. Et il m’a dit : ‘Demain, ça sera la deuxième’ », avait promis le jeune prodige français. Et là, à la fin du match, il m’a dit : ‘Je t’avais dit qu’on gagnerait la deuxième’. »

Reste à finir le travail en ne tremblant pas à domicile face au Barça ce mercredi 10 mars.

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