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LETTRE DU BENELUX
Ils sont 43 % à ne pas associer Adolf Hitler au mal et 73 % à ne jamais avoir entendu parler du génocide rwandais. S’ils sont d’origine arabo-musulmane, 28 % d’entre eux pensent que les services secrets israéliens sont derrière les attaques du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis. C’est le bilan aussi sombre qu’affligeant que dressent deux chercheurs sur l’état d’esprit dans des collèges et des lycées de la ville-région de Bruxelles.
Il aura fallu trois ans à Joël Kotek et Joël Tournemenne pour obtenir un financement public régional afin de mener à bien leur enquête dans une soixante d’établissements – trente-huit acceptant finalement d’y participer. Et c’est avec le soutien de la Fondation Jean-Jaurès, proche du Parti socialiste français, qu’ils ont publié leur étude, à la fin 2020.
Sans doute les responsables politiques belges redoutaient-ils le titre un peu trop explicite donné à ce projet – « Le juif et l’autre dans les écoles francophones bruxelloises » – par deux universitaires du Centre européen d’études sur la Shoah, l’antisémitisme et les génocides, lié à l’Université libre de Bruxelles.
Sans doute les dirigeants de la région craignaient-ils aussi des conclusions risquant d’illustrer les carences d’un système éducatif qui néglige l’histoire, la philosophie ou l’éducation aux médias. De quoi encourager, bien sûr, le complotisme et les lacunes – « effrayantes » dit M. Kotek – des jeunes sur de grands thèmes sociétaux.
Les « ravages du déni »
Sans doute, enfin, le monde politique ne voulait-il pas qu’on mette le doigt de façon un peu trop insistante sur les « ravages du déni » dont parle Elisabeth Badinter. A savoir, cette pratique consistant, dans le débat public ou dans les médias, à mettre sous le tapis tous les sujets qui fâchent et qui pourraient menacer le fragile équilibre entre les différentes communautés et les différentes religions dans une grande ville.
Or, ce déni est bien une réalité à Bruxelles, ville aux allures de patchwork, où les plus pauvres ne côtoient pas les plus riches, où la segmentation entre autochtones et personnes d’origine étrangère limite les échanges, sous l’œil indifférent de la communauté des fonctionnaires internationaux.
Il ne faut pas se tromper, insistent toutefois MM. Kotek et Tournemenne : les facteurs socio-économiques existent bel et bien mais ils sont moins déterminants que les représentations culturelles et religieuses quand il s’agit d’expliquer une série de phénomènes, dont l’antisémitisme. L’attentat contre le Musée juif de Bruxelles, commis par Mehdi Nemmouche, qui a tué quatre personnes en mai 2014, n’a apparemment provoqué aucun changement, sauf peut-être le renforcement de la présence de policiers et de militaires aux abords des synagogues et des écoles juives.
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