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Tribune. Pour avoir outrepassé les cent vingt secondes autorisées lors de son passage aux toilettes, Gulzira Auelhan reçoit des électrochocs à la tête. Oui, à la tête, car, selon ses gardiens, ces chocs laisseraient plus de traces sur d’autres parties de son corps. L’histoire horrifiante de Mme Auelhan ne remonte pas à la terrible époque de la Révolution culturelle mais date bien de 2018, il y a à peine trois ans. Gulzira est une femme kazakhe du Xinjiang, cette région du nord-ouest de la Chine où près d’1,8 millions de personnes de minorités turcophones et à majorité musulmanes (principalement des Ouïgours) sont internées dans des camps de rééducation.
Le Xinjiang est le laboratoire sans précédent de la répression chinoise. Cette expérimentation à grande échelle est, entre autres, rendue possible par Huawei.
Par deux fois, l’entreprise de télécommunication a nié et démenti toute collaboration et participation à la répression du Xinjiang. La première fois, John Suffolk, responsable mondial de la cybersécurité et de la protection de la vie privée chez Huawei, expliquait que l’entreprise n’entretenait que des relations commerciales et que les autorités de sécurité de l’Etat chinois n’étaient pas des clients directs. La seconde, le vice-président de Huawei au Canada déclarait : « Nous vendons notre technologie au monde entier. Nous n’avons pas connaissance de l’usage de nos clients. »
Les preuves sont pourtant indéniables : à deux reprises donc, Huawei a ouvertement menti. De nouveaux documents permettent d’en attester.
Des villes entières sous surveillance
En 2014, le président Xi Jinping a proclamé une « guerre contre le terrorisme » dans le Xinjiang. La même année a débuté la mise en place d’un état de surveillance numérique généralisée, dans laquelle Huawei a joué un rôle crucial. Et l’entreprise a reçu une récompense bien particulière de la part du chef du ministère de la sécurité publique du Xinjiang : la fourniture des systèmes de surveillance de villes entières lui était confiée. Déjà, à l’époque, toutes les données des réseaux urbains de caméras de surveillance pouvaient être stockées dans le cloud grâce aux technologies de Huawei.
Parmi ces villes sous surveillance figurait déjà Kashgar, berceau de la culture ouïgoure où plus de 90 % des habitants sont issus de ce peuple turcophone. En août 2017, au point culminant de la campagne d’internement des ces musulmans chinois, un représentant du gouvernement de la ville décrivait la collaboration des autorités avec Huawei comme « très étroite ». Une coopération qui s’étend à plusieurs domaines et sous la forme, entre autres, d’un partenariat avec les forces de police. Un ancien ingénieur de Huawei revendique souvent dans son CV son rôle, au nom de l’entreprise, entre juillet 2017 et septembre 2018, dans un « projet de vidéosurveillance policière ».
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