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En plein effondrement économique, le Liban n’en finit pas de s’enfoncer dans le marasme. La livre a atteint mardi 2 février un plus bas historique sur le marché noir, frôlant les 10 000 livres pour un dollar et suscitant la colère de la rue.
Officiellement, la monnaie locale reste indexée sur le billet vert au taux de 1 507 livres pour un dollar, observé depuis plus de deux décennies. Mais sur le marché noir, elle connaît depuis l’automne 2019 une dégringolade sans précédent. Mardi, le dollar s’échangeait pour 9 900 à 10 000 livres, ont déclaré plusieurs changeurs.
« C’est fou ce qui se passe », a déclaré l’un d’eux sous couvert d’anonymat. Le billet vert évoluait autour de 8 000 à 9 000 livres ces dernières semaines. En juillet 2020, il avait déjà atteint les 9 800 livres.
Le Liban est englué dans sa pire crise économique depuis des décennies, aggravée par une impasse politique et la pandémie. Ce plus bas de la livre libanaise a provoqué la colère de la rue : des rassemblements ont eu lieu dans plusieurs régions du pays, y compris à Tripoli (nord), Saïda (sud) et dans la Bekaa (est), où des dizaines de manifestants en colère ont bloqué des routes à l’aide de pneus incendiés et de bennes à ordures renversées.
Certains ont repris en chœur les slogans phares de la « révolution » du 17 octobre 2019, date du début d’un mouvement de contestation inédit contre une classe dirigeante inchangée depuis des décennies et accusée de corruption et d’incompétence.
« Situation insoutenable »
« J’appelle tout le monde à descendre dans la rue, la situation est devenue insoutenable », a lancé une manifestante au micro d’une chaîne locale sur la place des Martyrs, place forte du mouvement à Beyrouth. « Nous resterons ici jusqu’à faire tomber cette classe [politique] corrompue avec à sa tête Michel Aoun », a renchéri un autre, un keffieh enroulé autour du cou.
La nouvelle chute de la livre intervient au moment où la banque centrale (Banque du Liban, BDL) a commencé à passer au crible la situation financière des banques, sur fond de pressions internationales pour une restructuration du secteur bancaire.
Les banques libanaises avaient jusqu’à dimanche pour augmenter leur capital de 20 %, une des mesures réclamées par la BDL pour doper leur solvabilité et leur niveau de liquidités. La dépréciation a déjà entraîné en 2020 une hausse drastique des prix et la pauvreté touche désormais la moitié de la population.
Les hashtags #dollar et #marchénoir arrivaient en tête des tendances Twitter au Liban mardi. « Le taux de change a atteint 10 000 livres et il n’y a toujours pas de gouvernement », a déploré une internaute.
Le pays attend depuis plus de six mois la formation d’un nouveau cabinet. Le gouvernement actuel a démissionné après l’explosion meurtrière et dévastatrice du 4 août au port de Beyrouth mais continue de gérer les affaires courantes. « La livre du Liban s’effondre davantage – l’impasse politique se poursuit et aucune politique pour enrayer l’effondrement », a écrit sur Twitter l’analyste Maha Yahya, du centre Carnegie Moyen-Orient.
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