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Covid: La France délaisse-t-elle sa jeunesse par rapport au reste de l’Europe?

De Paris à Stockholm en passant par Copenhague, les jeunes européens sont parmi les plus touchés par la crise sanitaire. Près de trois millions des moins de 25 ans sont au chômage, soit quelque 18%, un taux bien supérieur au reste de la population active. Quant aux étudiants, ils sont bien souvent cantonnés à suivre leur formation supérieure derrière leur ordinateur la journée tout en bataillant pour manger le soir. En témoignent, en France, les files interminables d’étudiants devant les banques de distribution alimentaire.

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Cette dure réalité fait ressurgir une question brûlante: faut-il instaurer des minimums sociaux pour les moins de 25 ans pour aider une génération qui se sent sacrifié? Le débat fait rage en Europe, particulièrement en France, et révèle de grandes disparités entre les pays qui n’accompagnent pas les jeunes de la même façon pour s’insérer dans la vie active. Petit tour d’horizon des dispositifs existants dans l’Union européenne.

Les pays nordiques, un Eldorado pour les jeunes?

Le nord de l’Europe, avec son approche sociale-démocrate, fait figure de modèle et d’Eldorado pour les jeunes. Danemark, Suède, Finlande… Tous ont choisi d’investir massivement dans la jeunesse: « Dès leur entrée dans le supérieur, les étudiants par

exemple touchent une bourse universelle, c’est-à-dire non calculée en fonction du revenu de leurs parents, explique le chercheur Tom Chevalier, auteur du livre La jeunesse dans tous ses Etats (aux éditions PUF). En complément, ils peuvent faire un prêt qu’ils ne devront rembourser que si leur revenu, une fois dans la vie active, dépasse un certain montant. » Par exemple au Danemark, la bourse est d’environ 700 euros mensuels avec la possibilité d’un prêt garanti d’environ 300 euros par mois. A noter que les études du supérieur sont gratuites.

Autre étage de la fusée: les aides accordées aux jeunes décrocheurs. « Les pays nordiques interviennent tout de suite via des prestations chômage, poursuit Tom Chevalier. Ils sont ensuite tenus de participer à différents programmes tels que la garantie jeune, aujourd’hui généralisée dans tous les pays européens mais qui a été inventée dans le nord. L’accent est mis sur la formation pour qu’ils acquièrent des compétences recherchées par les entreprises. »

La France peu mieux faire

La France, avec sa protection sociale généreuse, suit de près l’exemple nordique. « Le système d’aide sociale couvre une plus grande partie de la population des jeunes adultes que la plupart des autres systèmes d’Europe continentale et offre un filet de sécurité important aux individus les plus vulnérables ayant quitté le système éducatif mais n’ayant pas trouvé d’emploi », avance Olivier Thevenon, économiste de l’OCDE. Mais une grande différence subsiste: « l’Etat concentre ses efforts sur les aides au logement alors que l’accès aux autres prestations sociales est bien plus limité (…) A charge des familles de compenser une partie des coûts liés à l’entretien d’un jeune adulte », poursuit-il. Ce choix se répercute dans la fiscalité: les parents bénéficient d’avantages fiscaux aussi longtemps que leur enfant reste étudiant et âgé de moins de 25 ans.

A noter, les efforts depuis 2013 de la France pour aider les plus en difficulté à travers la généralisation de la garantie jeune, un dispositif qui a pour but de réinsérer les décrocheurs via la distribution d’une allocation et d’une succession de formations et stages en entreprise. Après avoir augmenté le nombre de place fin 2020 à 200.000, la ministre du Travail, Elisabeth Borne, a choisi en ce début d’année de changer de braquet en voulant instaurer une garantie jeune universelle dont les contours sont encore flous. L’idée serait de fusionner plusieurs dispositifs d’insertion, ce qui permettrait d’élargir la cible de ce dispositif. Reste le point faible de l’Hexagone: quasi aucune aide pour accompagner les jeunes cherchant leur premier job, une fois leur diplôme en poche. Un problème criant pendant cette crise sanitaire où les embauches sont dans beaucoup de secteurs repoussées aux calendes grecques. D’où l’idée de certains, comme le Parti socialiste qui a déposé une proposition de loi en ce sens mi-février, d’étendre le revenu de solidarité active (RSA) au moins de 25 ans. D’autres comme Stanislas Guerini, secrétaire général de la République En Marche, s’inspirent plus du modèle nordique en proposant « un capital jeune pour se lancer dans la vie » sous la forme d’un prêt de 10.000 euros pour les 18-25 ans. 

Le pays d’Albion, moins généreux

Reste l’Angleterre, pays de tradition libérale, moins protecteur. Les jeunes sont-ils livrés à eux-mêmes et à leur bonne fortune? Oui et non. « L’Etat contribue au financement des études et, en particulier, il aide les jeunes gens méritants à intégrer des établissements d’éducation tertiaire à la mesure de leurs aptitudes », explique Olivier Thevenon de l’OCDE. Concrètement, les étudiants de l’enseignement supérieur s’acquittent des frais de scolarité, souvent élevés, mais une majorité perçoit une bourse, la moitié des demandes étant approuvées. Pour les autres, ils peuvent souscrire des prêts garantis par l’Etat à des taux préférentiels: « Quatre cinquièmes de l’ensemble des étudiants recourent à ces dispositifs, poursuit l’économiste. L’idée étant qu’un prêt engage la responsabilité de celui qui le souscrit et le prépare par conséquent à la vie d’adulte. »

En revanche pour les décrocheurs, la situation est paradoxale: les indemnités destinées aux demandeurs d’emploi sont marginales (seuls 4% des jeunes en bénéficient selon l’OCDE) mais des aides sociales ciblées sur les plus vulnérables existent. « Les jeunes adultes demandeurs d’emploi ayant quitté le système éducatif reçoivent ainsi une aide au logement deux fois plus souvent (24,7%) que les jeunes gens en général (12,6%), tandis que 23,3% d’entre eux reçoivent également une aide sociale à laquelle les autres jeunes gens n’ont pas droit », détaille Olivier Thevenon.

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