Le nouveau Premier ministre italien Mario Draghi a appelé mercredi à « reconstruire » le pays frappé de plein fouet par la crise sanitaire et économique, promettant de « combattre la pandémie par tous les moyens ».
« Comme les gouvernements de l’immédiat après-guerre, nous avons la responsabilité de lancer une Nouvelle Reconstruction », a-t-il affirmé lors de la présentation de son programme au Parlement. « C’est cela notre mission en tant qu’Italiens: laisser un pays meilleur et plus juste à nos enfants et petits-enfants », a-t-il ajouté
M. Draghi, un homme très discret de 73 ans éduqué chez les jésuites, a succédé samedi à Giuseppe Conte, contraint à la démission après l’explosion de sa coalition, alors que l’Italie approche de la barre des 100.000 morts dues au Covid et a enregistré en 2020 l’une des pires chutes du PIB de la zone euro (-8,9%).
« Le principal devoir auquel nous sommes tous appelés (…) est de combattre par tous les moyens la pandémie et de sauver les vies de nos concitoyens », a-t-il souligné, alors que moins de 1,3 million d’Italiens sur une population de 60 millions ont reçu les doses nécessaires à l’immunisation.
L’ex-président de la Banque centrale européenne (BCE) a aussi plaidé pour une « Union européenne plus intégrée qui aboutira à un budget public commun, capable de soutenir les Etats-membres durant les périodes de récession », tout en proclamant « l’irréversibilité du choix de l’euro ».
« Sans l’Italie, il n’y a pas d’Europe », a estimé Mario Draghi, qui dirige une coalition hétéroclite allant de la gauche à l’extrême droite du tribun souverainiste Matteo Salvini. Il a aussi affirmé sa volonté de « renforcer » les relations « stratégiques » avec la France et l’Allemagne.
La troisième économie de la zone, qui a perdu 444.000 emplois en 2020, compte beaucoup sur la manne du plan de relance européen, dont le versement est lié à la présentation à Bruxelles d’ici à fin avril d’un plan détaillé de dépenses, l’une des missions du nouveau gouvernement.
– « Equilibre fragile » –
« Nous aurons à notre disposition environ 210 milliards d’euros sur une période de six ans. Ces ressources devront être dépensées pour améliorer le potentiel de croissance de notre économie », a souligné M. Draghi au cours de son discours de trois quarts d’heure, citant comme priorités « les énergies renouvelables, la lutte contre la pollution de l’air et de l’eau, le train à grande vitesse (…), la production et distribution d’hydrogène, la numérisation et la 5G ».
Le Sénat doit se prononcer sur son programme par un vote de confiance mercredi soir, tandis que la Chambre des députés se prononcera jeudi.
Il devrait obtenir sans problème le feu vert des deux chambres, tant sa majorité parlementaire est large.
Au cours d’une seconde intervention dans la soirée, M. Draghi a plaidé pour une répartition obligatoire des migrants entre les divers pays de l’UE.
« L’Italie, soutenue également par certains pays méditerranéens, propose comme mesure de solidarité concrète un mécanisme de redistribution obligatoire des migrants », a-t-il précisé.
Confrontée à l’arrivée de dizaines de milliers de migrants, Rome demande depuis des années la renégociation du règlement européen de Dublin, qui confie le traitement des demandes d’asile au pays d’arrivée.
Depuis que le président de la République Sergio Mattarella a fait appel à lui le 3 février, Mario Draghi a formé une majorité allant du Parti démocrate (PD, centre gauche) à la Ligue d’extrême droite de Matteo Salvini en passant par le Mouvement 5 Etoiles (M5S, antisystème jusqu’à son arrivée au pouvoir).
« Aujourd’hui l’unité n’est pas une option, l’unité est un devoir », a martelé M. Draghi, alors que les débuts de son gouvernement ont été marqués par une virulente polémique contre le ministre de la Santé Roberto Speranza, qui a annoncé dimanche soir seulement l’interdiction de rouvrir lundi matin les pistes de ski.
Ces premières bisbilles augurent un parcours accidenté pour Mario Draghi comme l’explique Teresa Coratella, analyste au sein de European council of foreign relations (ECFR), dans un entretien avec l’AFP : « nous avons un gouvernement très fort du point de vue de la compétence des ministres, mais avec un équilibre politique très fragile, avec des interlocuteurs politiques qui changent d’opinion et ne sont pas très fiables ».
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