Dimanche 14 février 2021, 21 h 30. Soudain, une batucada du démon fait trembler le Sambodrome, l’avenue du défilé. Des milliers de danseurs emplumés, dressés sur des chars allégoriques de dix mètres de haut, dansent en cadence, sous les vivats de 10 millions de fêtards présents sur les gradins et dans les rues. Plus grande fête de l’humanité, le Carnaval de Rio peut commencer.
Du moins, c’est ce qui aurait dû arriver. Mais voilà, le Covid-19 est passé par là : plus de 17 000 victimes à Rio, 230 000 au Brésil. Repoussée une première fois, l’édition 2021 du Carnaval est finalement annulée. Du jamais-vu dans l’histoire de la « ville merveilleuse ». « Une décision très triste, qui me blesse, m’atteint au cœur… mais une décision inévitable. Il n’y avait pas d’alternative », soupire le maire, Eduardo Paes.
Ce 14 février aurait dû être un grand jour pour lui. Un sacre, même, pour ce « roi de Rio » de 51 ans, figure majeure et controversée de la politique brésilienne, déjà maire de la ville entre 2009 et 2016 à l’époque des Jeux olympiques, et réélu en novembre 2020 dans un fauteuil à ce même poste, avec plus 64 % des voix – il a pris ses fonctions en janvier.
« Je suis un maire carnavalesque ! », lance tout de go l’édile, fou de carnaval depuis sa jeunesse, qui reçoit dans ses bureaux modernes, situés – le hasard fait bien les choses – à deux pas du Sambodrome. Lui-même pousse régulièrement la passion jusqu’à défiler au milieu des chars, aux côtés des membres de l’école de samba qu’il chérit, la légendaire Portela, au drapeau bleu et blanc.
« Duda » est un Carioca jusqu’au bout des tongs Havaianas. Dans une ville devenue au fil des années très provinciale, Monsieur le Maire ne s’embarrasse pas de chic. Blagueur, jovial, Eduardo Paes parle haut, renifle fort, bat la campagne en bermuda et chapeau panama, n’hésitant pas à entonner, à l’occasion, des airs de samba, une bière à la main. « Duda », en apparence, est d’abord perçu comme un type sympa.
Mais il est aussi, et avant tout, un bourreau de travail. Perfectionniste, hyperactif, parfois colérique, l’homme arbore le visage blafard de ceux qui ne vont jamais à plage. Ses journées commencent à 5 heures du matin et se terminent tard dans la nuit, au rythme d’un agenda frénétique, ne laissant que peu de place à la vie de famille. « Sur les albums de vacances de mes enfants [deux ados], il n’y a presque aucune photo de moi », confiait-il en 2016 à la revue Piaui.
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