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OpenLux : profils sulfureux et argent sale prospèrent dans le centre financier du Luxembourg

Par Anne Michel , Maxime Vaudano et Jérémie Baruch

Publié aujourd’hui à 05h58, mis à jour à 08h12

C’est un homme en fuite, recherché par la justice en France, en Suisse et en Espagne. C’est l’un des intermédiaires de l’affaire de Karachi, ces rétrocommissions versées dans le cadre de contrats d’armement signés avec le Pakistan et l’Arabie saoudite qui auraient servi à financer la campagne présidentielle d’Edouard Balladur en 1995. En juin 2020, Abdul Rahman El-Assir a été condamné à cinq ans de prison ferme par contumace par la justice française, en même temps que son ancien associé Ziad Takieddine.

Mais au Luxembourg, M. El-Assir est un investisseur comme un autre. Il apparaît dans la base OpenLux comme le propriétaire, aux côtés de son frère, de Wheelerdale Corporation. Une société fantôme inscrite dans une boîte aux lettres, qui se révèle être la maison mère de Gulf Interstate Engineering, un sous-traitant de l’industrie pétrolière basé au Texas, qui pèse plus de 70 millions d’euros.

M. El-Assir n’a visiblement rencontré aucun obstacle pour transférer cette société de l’île caribéenne de Curaçao vers le Luxembourg, en décembre 2012. Pourtant, six mois plus tôt, l’intermédiaire, qui avait fui en Suisse, avait été mis en examen par un magistrat helvétique, au nom de la justice française. L’information était parue dans la presse et il était donc déjà publiquement soupçonné d’avoir joué un rôle-clé dans l’affaire de Karachi. Sa condamnation, en juin 2020, n’a pas davantage entravé ses affaires luxembourgeoises : la société est, depuis, restée active.

Le cas Wheelerdale n’est pas isolé, et c’est l’une des surprises de l’enquête OpenLux. Dans la base de données des propriétaires de sociétés luxembourgeoises reconstituée par Le Monde apparaissent plusieurs dizaines de personnes impliquées dans des affaires de corruption, de fraude fiscale et de blanchiment, ainsi que des individus liés à la criminalité organisée ou ayant fait l’objet de sanctions internationales.

L’ancien sprinteur namibien Frankie Fredericks a, lui aussi, ouvert une société au Luxembourg, Jamsorf, en mai 2018. Les soupçons de corruption dans l’attribution des Jeux olympiques de Rio pesant sur cet ancien membre influent du Comité international olympique (CIO), sa mise en examen par la justice française six mois plus tôt et sa suspension, dans la foulée, par le CIO n’ont pas fait obstacle à sa démarche. A quoi était destinée cette société ? Mystère, car elle a été fermée avant d’avoir publié ses comptes, et Frankie Fredericks n’a jamais donné suite aux sollicitations du Monde.

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