Analyse. Le Britannique Michael Gove fut l’une des chevilles ouvrières de la campagne référendaire pour quitter l’Union européenne (UE) en 2016. A partir de la mi-2019, au sein du gouvernement de Boris Johnson, il a veillé à la préparation du Brexit, coprésidant le « Joint Committee » chargé de mettre en musique le protocole nord irlandais. Cette partie cruciale du traité de divorce avec l’UE est destinée à préserver l’accord de paix de 1998 et à éviter le retour d’une frontière entre la République d’Irlande (membre de l’UE) et l’Irlande du Nord, province du Royaume-Uni.
C’est pourtant le même M. Gove qui, le 8 février, a dénoncé un protocole « qui ne fonctionne pas en ce moment » et accusé l’UE d’avoir « ouvert la boîte de Pandore » en suspendant brièvement l’application du protocole dix jours plus tôt. Et c’est aussi lui qui a réclamé l’extension d’une « période de grâce » jusqu’à janvier 2023, sans contrôles douaniers pour une série de produits transitant entre Grande-Bretagne et Irlande du Nord. De quoi alimenter le discours jusqu’au-boutiste du DUP, parti unioniste (partisan du maintien dans le Royaume-Uni) nord-irlandais, qui réclame que le protocole soit purement et simplement abandonné.
Faux pas de la Commission européenne
Depuis le 31 décembre 2020, date de mise en œuvre du Brexit (et de l’instauration d’une frontière en mer d’Irlande, l’Irlande du Nord demeurant dans le marché intérieur européen pour les biens), le trafic portuaire entre l’Irlande du Nord et le reste du Royaume-Uni a chuté (entre 30 % et 50 % de volumes en moins fin janvier, par rapport à janvier 2020). De nombreuses sociétés se plaignent de la complexité des déclarations en douanes pour acheminer les marchandises dans les ports de Belfast et de Larne.
Mais ces difficultés n’ont rien à voir avec l’énorme bévue de la Commission européenne, le 29 janvier, qui dans un moment de panique, attaquée sur sa gestion discutable des achats de vaccins, et au prétexte de vouloir contrôler leurs sorties de l’UE, a envisagé de réintroduire des contrôles sur l’île d’Irlande. Cette décision inconsidérée a fait mal à l’image de l’institution, mais celle-ci a très vite reconnu son erreur et rétropédalé.
Le gouvernement refuse toujours d’assumer les conséquences du Brexit et tente de masquer la réalité aux Britanniques
Les freins aux échanges entre Grande-Bretagne et Irlande du Nord résultent en réalité surtout du Brexit, d’un manque d’anticipation et d’une mise en place tardive du protocole nord-irlandais. « Nous n’avons reçu les spécifications pour les déclarations en douane des colis que le 31 décembre 2020, les entreprises n’ont pas eu le temps de se préparer », précisait Sarah Hards, de la société de transport nord-irlandaise AM Nexday, lors d’une audition parlementaire le 10 janvier.
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