L’armée sénégalaise a indiqué, mardi 9 février, avoir pris trois « bases » des rebelles en Casamance (sud) et récupéré des armes lors d’une offensive lancée fin janvier avec le soutien de la Guinée-Bissau voisine. Aucune indication sur les pertes de part ou d’autre n’a été fournie, et aucune évaluation du bilan humain n’est par ailleurs disponible de source fiable et indépendante.
Des officiers ont emmené la presse, dont des journalistes de l’AFP, pour une visite rare sur deux de ces cantonnements, des abris de tôle et de bois disséminés sous les grands arbres de la forêt de Blaze et abritant des sortes de bunkers enterrés pouvant abriter quelques personnes. Les alentours de ces bases étaient ponctués de surfaces calcinées – des traces des combats selon les officiers sénégalais.
Les bases, relativement intactes, appartenaient au Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC), qui mène depuis 1982 une rébellion indépendantiste armée, a dit le colonel Souleymane Kandé, chef local de l’armée sénégalaise. Elles ont été capturées après des tirs d’artillerie, précédant l’assaut donné par les forces terrestres soutenues par des avions et des hélicoptères, a précisé, sous le couvert de l’anonymat, un officier disant avoir participé aux combats.
Les rebelles ont notamment été chassés de leur base de Badjom, « le centre de gravité du MFDC », à une vingtaine de kilomètres de Ziguinchor, principale ville de Casamance, selon le colonel Kandé. Les forces sénégalaises ont dit avoir saisi des mortiers, des lance-roquettes, des fusils et des motos, qu’ils ont montrés à la presse. Elles ont aussi dit avoir pris le contrôle de plusieurs hectares de champs de cannabis. « Ce sont des exploitations industrielles de chanvre indien qui nourrissaient l’économie criminelle des bandes armées », a dit le colonel Kandé. Les officiers ont admis que les rebelles disposaient d’autres « bases » dans la région.
« Ni guerre ni paix »
« Il y a eu un grand concours des forces de défense et de sécurité bissau-guinéennes, une coopération opérationnelle et militaire », a affirmé le colonel Kandé. La Guinée-Bissau a longtemps été accusée de servir de base arrière aux rebelles, voire de leur procurer des armes. Un allié du président sénégalais, Umaro Sissoco Embalo, a accédé à la présidence de la Guinée-Bissau en 2020.
Les officiers sénégalais n’ont pas dit combien de temps l’opération lancée le 26 janvier durerait encore. Après des années de situation de « ni guerre ni paix » dans cette région fertile et enclavée, l’opération a été déclenchée à la suite d’« exactions » commises contre les populations par les rebelles, selon les officiers. Elle vise aussi, d’après l’armée sénégalaise, à permettre aux populations déplacées de se réinstaller et à mettre fin aux trafics qui prospèrent dans la région, comme ceux du bois ou du chanvre indien.
La Casamance, région séparée du nord du Sénégal par la Gambie, avait connu un regain de violences début 2018 avec le massacre de quatorze hommes près de Ziguinchor. L’armée avait alors interpellé une vingtaine de suspects, qui attendent toujours d’être jugés. Les tractations de paix, rendues ardues par les divisions internes du MFDC, avaient été relancées après l’arrivée au pouvoir du président Macky Sall, en 2012. Mais elles n’ont pas abouti à un accord définitif pour mettre un terme à un conflit qui a fait des milliers de victimes civiles et militaires, ravagé l’économie et poussé de nombreux habitants à fuir.
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