« Aujourd’hui il fait beau et c’est la Sainte-Dorothée. » Même si Matteo Salvini ne s’est pas privé ces dernières années de faire référence au catholicisme, brandissant dès qu’il est possible le chapelet ou l’Evangile, il n’est tout de même pas fréquent de le voir commencer un point de presse par l’éphéméride. C’est pourtant ce qu’il s’est passé samedi après-midi, à Rome, alors que le dirigeant de la Ligue (extrême droite) et ancien ministre de l’intérieur du premier gouvernement Conte sortait de Montecitorio (siège de la Chambre des députés) après son entrevue avec l’ancien président de la Banque centrale européenne (BCE) Mario Draghi, désigné pour former, avec son soutien, le prochain exécutif italien.
En évoquant sainte Dorothée, Matteo Salvini ne cherchait pas particulièrement à citer une martyre chrétienne du IVe siècle, patronne des jardiniers et des jeunes mariés. Le clin d’œil est ailleurs : il s’agit de rappeler le temps de la Démocratie chrétienne, dont une des tendances les plus influentes s’était constituée dans un couvent de Rome dédié à la sainte et la priait chaque année, le 6 février. Ce clin d’œil à l’âge d’or de la démocratie chrétienne est tout sauf innocent, au moment d’annoncer son ralliement au gouvernement Draghi qui s’ébauche, ouvrant la voie à la définition d’une majorité couvrant presque l’ensemble du paysage politique.
Quelques heures plus tard, sur Radio 24, il résumera les raisons de ce virage tactique : « Je laisse aux autres les étiquettes : fasciste, communiste, européiste. Moi je suis quelqu’un de pragmatique et concret. Si, avec le professeur Draghi, on peut parler de baisse des taxes pour les personnes et les entreprises, j’en suis. » Quelques instants après, sur les rapports avec Bruxelles, il déclare : « Nous avons les mains, les pieds, le cœur et le cerveau en Europe, mais naturellement je veux une Europe qui défende les entreprises et l’agriculture italiennes. » En conséquence, le soutien à l’ancien président de la Banque centrale européenne ne fait plus l’ombre d’un doute : avec lui, « on peut rester en Europe la tête haute ».
Infléchissements successifs
Matteo Salvini n’a pas été touché par la grâce en un instant, samedi après-midi. Sa « conversion » européenne n’est pas une bascule soudaine, mais plutôt le résultat de mois d’infléchissements successifs. Quand il est arrivé à la tête de la Ligue, fin 2013, Matteo Salvini a choisi de construire son discours autour du rejet de Bruxelles, de l’euro et des migrants. Cette rhétorique lui a permis, en cinq ans, de transformer un petit parti à l’influence marginale, menacé de disparition, en force dominante à l’échelle nationale (moins de 7 % aux élections européennes de 2014 contre 35 % cinq ans plus tard).
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