Tribune. Le 29 janvier 2001, le Parlement français adoptait une loi dont l’article unique affirme que « la France reconnaît publiquement le génocide arménien de 1915 ». Votée à l’unanimité par l’Assemblée nationale, la proposition de loi avait néanmoins été âprement disputée au Sénat et très critiquée par le gouvernement, en particulier pour des raisons diplomatiques avancées par Hubert Védrine, le ministre des affaires étrangères.
Lorsque éclata en 2005 la controverse sur les lois dites « mémorielles », la reconnaissance du génocide arménien figurait en bonne place parmi ces lois auxquelles on reprocha simultanément, sans craindre la contradiction, d’établir une vérité officielle, de restreindre la liberté de l’historien mais aussi d’être purement déclaratoires au mépris du rôle de la loi.
Une « mission d’information » parlementaire dirigée par le président de l’Assemblée nationale préconisa en 2008 l’abandon de cette pratique, sans entendre remettre en cause les lois déjà adoptées. La même année, une révision de la Constitution redonna au Parlement la possibilité d’adopter des « résolutions », afin de prendre des positions solennelles sans galvauder la loi.
Le rôle du Conseil constitutionnel
Depuis, la loi de 2001 a été l’objet d’attentions contradictoires. Certains ont essayé sans succès de la « compléter », en adjoignant à la reconnaissance du génocide l’incrimination de sa négation. D’autres s’efforcent en vain d’obtenir l’abrogation de la loi par le Conseil constitutionnel. Loin de faciliter la répression du négationnisme, la loi de 2001 a servi d’argument pour l’empêcher.
En 2012, le Parlement vota une interdiction de contester l’existence des génocides reconnus par la loi. Cette manière alambiquée de désigner la négation du génocide des Arméniens fut censurée par le Conseil constitutionnel. Cet organe considère en effet que la loi doit être « normative » : elle doit interdire, permettre, ordonner un comportement, et ne saurait s’épuiser dans une simple déclaration.
Le Conseil constitutionnel jugea ainsi qu’en renvoyant à la simple reconnaissance d’un génocide, la loi litigieuse violait la Constitution. Il n’échappera pourtant pas à l’observateur attentif que l’interdiction de nier un génocide, fût-il reconnu par la loi, n’est guère dénuée de portée normative. C’était plutôt la décision du Conseil constitutionnel qui était dénuée de logique.
La loi de 2001 est dans les limbes du droit
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