Dans le centre de dépistage Covid-19 de Biogroup à Notting Hill, un quartier cossu de Londres, deux techniciens en blouse blanche attendent le chaland. Au bout de trente minutes, un homme qui part en voyage vient se faire faire le prélèvement et repart aussitôt.
Pendant les vacances de Noël, les clients allaient et venaient, mais, depuis, avec la propagation de nouveaux variants et un reconfinement en Angleterre, la demande, essentiellement de la part de voyageurs, a chuté de 350 personnes par jour à environ 150 sur les quatre centres londoniens de Biogroup UK.
Les fondateurs de cette filiale du groupe éponyme d’analyses médicales français, un leader du marché hexagonal, croient toutefois en leur pari de s’implanter au Royaume-Uni à la faveur de l’épidémie.
« Notre stratégie est opportuniste: il y avait une crise sanitaire et on a mis nos moyens au service de la population anglaise et londonienne », explique à l’AFP Thomas Leclerc, co-fondateur de Biogroup UK et directeur de la région ouest France, dans le rutilant laboratoire d’analyses londonien où une poignée de laborantins s’active au milieu de dizaines de machines de diagnostic.
Avec Astrid Gouillard, co-fondatrice de Biogroup UK, ils parient sur une demande de tests de dépistage face à la pandémie qui selon eux va durer, malgré la campagne de vaccination en cours.
« Vu l’évolution, je ne crois pas qu’on en sera sortis d’ici deux, trois mois, c’est un marché qui risque de durer 6 mois, un an, voire plus. A mon avis, les transporteurs vont demander de faire un test PCR de toute façon au moins toute l’année 2021 », argumente cette biologiste et pharmacienne de formation, qui vit à Londres depuis 2004.
Tout est allé très vite. « En septembre, n’ayant pas réussi à me faire tester je me suis dit que j’allais lancer un laboratoire de tests Covid. En Angleterre, c’est beaucoup plus facile qu’en France », raconte-t-elle.
Le premier centre de dépistage a ouvert mi-décembre, en plein compte-à-rebours de l’entrée en vigueur effective du Brexit au 1er janvier.
– Failles britanniques –
Biogroup UK mise sur les failles du système de dépistage britannique. A la différence de la France où un vaste réseau de laboratoires d’analyses médicales privés réalisent les tests qui sont ensuite remboursés par la sécurité sociale, le système public de santé britannique, le NHS, en réalise l’essentiel. « Le privé ne représente que 5% », d’après Mme Gouillard.
Cette maigre part de marché peut donc difficilement compléter le système public engorgé lors de crises sanitaires comme actuellement.
En outre, si en France tout le monde peut se faire tester gratuitement à volonté en pharmacie ou laboratoire, au Royaume-Uni, seules les personnes présentant des symptômes bénéficient du dépistage Covid-19 du NHS, à part lors de campagnes de tests ponctuelles et locales.
Pour les cas contacts, ceux qui veulent voyager ou rendre visite à une personne à risque, le privé est donc la seule option, sauf à mentir au NHS sur sa situation.
En outre, le NHS débordé fournit ces tests parfois avec un retard de plusieurs jours, ce qui peut invalider le dépistage. Biogroup fournit des tests en 24 heures, ce qu’il considère essentiel pour un traçage efficace.
Mais, même si Biogroup assure que ses prix se situent dans la fourchette basse à Londres, ils sont élevés – 135 livres par personne. Pour une famille, ou une entreprise, l’addition grimpe très vite. Certaines entreprises avec lesquelles Biogroup discute en vue de contrats pour qu’elles puissent tester leurs employés y regardent à deux fois.
« On a investi, on ne peut pas faire ces tests (pour rien), sauf si on a du volume », justifie Astrid Gouillard.
« Le fait que ces tests PCR de confort ne sont pas pris en compte par le secteur public est un marché pour nous, en revanche, les volumes sont mécaniquement réduits. Donc la capacité à amortir les équipes, le matériel, les locaux reste limitée, d’où un niveau de prix supérieur à celui de la France », renchérit Thomas Leclerc.
Biogroup UK voit donc à « long terme pour développer une offre de biologie médicale en Angleterre » au-delà du Covid-19, qui serait à même de compléter les besoins du secteur public « quand il y a des crises ou besoins de développer des nouvelles technologies ».
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