A 40 ans, il a traversé tout ce que l’on peut désirer ou redouter de la vie : la gloire et l’oubli, l’ivresse des foules et leur vindicte, le pouvoir qu’on tient au creux de sa main et sa morsure. Wael Ghonim a été le wonder boy de la révolution égyptienne, celui qui la déclencha, le 25 janvier 2011. Aujourd’hui, son nom est presque tombé dans l’oubli. Certains le disent « fou », se demandent si ses Tweet relèvent d’un « canular ».
Faute de réponse de l’intéressé, plusieurs fois contacté par Le Monde, il faut se contenter de sa vie numérique. D’après son compte Twitter, Wael Ghonim est domicilié à Palo Alto, capitale de la Silicon Valley, en Californie. Il s’y présente comme « Egyptien, ex-Frère musulman, ancien de Google, ex-activiste et ex-mari. J’ai aidé à déclencher la révolution de 2011. Je remets tout en question. Père d’Isra et d’Adam ». Le suivre sur les réseaux sociaux – on s’est limité à Twitter, Facebook et Instagram – relève d’une activité à plein temps. On y trouve un déluge de messages, vidéos et statuts qui laissent transparaître le désarroi plus que l’amertume, une dépression profonde.
Il ne parle pas de politique, sauf pour s’insurger quand son frère est brièvement arrêté sans raison apparente au Caire, à l’été 2019. Parfois, il risque une allusion. Le 10 janvier, il écrit : « Si vous ne voulez pas que ce qui m’est arrivé arrive à vos enfants, dites-leur de ne pas se hâter dans leurs jugements sur ceux qui les oppriment, de ne pas courir derrière ceux qui font commerce de leur gentillesse et de ne pas baisser les bras face à ceux qui les harcèlent. J’ai très bien compris ce qui m’est arrivé. Je sais que je ne le dois qu’à moi-même et je ne me cache pas derrière ma douleur. C’est comme ça que j’arrive à continuer. Si je ne l’avais pas compris, je me serais suicidé. » Dans les quelque 200 commentaires qui suivent s’affiche une majorité de messages de soutien, mais aussi venant de détracteurs et de trolls de l’armée électronique du président Sissi, qui lui enjoignent de ne jamais revenir en Egypte ou en appellent à Trump pour clôturer son compte Facebook…
Grande religiosité
Fils de médecin, Wael Ghonim a grandi dans une famille aisée et étudié à l’Université américaine du Caire (AUC). A 18 ans, il fonde Islamway.com, une bibliothèque de prêches d’inspiration salafiste, vouée à un énorme succès. Cette grande religiosité, habillée des atours d’un geek de la Côte ouest, est encore présente dans sa communication en ligne parsemée de formules coraniques.
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