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Nouvelles atteintes à la liberté d’expression en Chine

Une publicité pour le film de guerre « The Battle at Lake Changjin » sur la guerre de Corée, le 1er octobre, à Pékin. NG HAN GUAN / AP

Le jour même où deux journalistes se voyaient décerner le prix Nobel de la paix – une information passée sous silence en Chine – Pékin prenait, vendredi 8 octobre, deux décisions visant à restreindre encore davantage la liberté d’expression. Les autorités ont arrêté Luo Changping, un ancien journaliste d’investigation qui a préféré changer de métier après l’arrivée de Xi Jinping au pouvoir. Son crime ? Avoir osé critiquer sur les réseaux sociaux le grand film patriotique The Battle at Lake Changjin, qui fait salles combles.

Diffusé à l’occasion de la fête nationale du 1er octobre, ce blockbuster revient sur un épisode décisif de la guerre de Corée (1950-1953) : l’encerclement durant dix-sept jours, par les troupes chinoises – venues à la rescousse de la Corée du Nord – de troupes de l’ONU dirigées par les Américains qui étaient, jusque-là, en train de mener une contre-offensive victorieuse contre l’armée de Pyongyang qui avait auparavant envahi le Sud. Menée en plein hiver, dans un froid extrême, la bataille de Changjin avait contraint les Américains à se retirer de Corée du Nord.

La Chine s’est toujours présentée comme une victime des Etats-Unis. La guerre n’y est connue que sous un seul nom : « La guerre de résistance à l’agression américaine et pour aider la Corée. » Que celle-ci ait été initiée par le dictateur Kim Il-sung, après avoir reçu le feu vert de Staline, n’apparaît nulle part. Les « volontaires » envoyés par Mao sont des héros, morts en martyrs. La leçon du film, selon un de ses scénaristes, est explicite : « La Chine ne se laisse pas intimider. » En une semaine, le film a réalisé plus de 3 milliards de yuans (plus de 400 millions d’euros) de recettes.

La « stupidité » des troupes chinoises

Dans un commentaire posté sur les réseaux sociaux en début de semaine, Luo Changping qualifiait les troupes chinoises de « stupides ». Plutôt que de débattre de la guerre, il suffit de comparer les niveaux de développement de la Corée du Nord et de la Corée du Sud pour s’en rendre compte, notait-il. Le commentaire a été censuré et l’auteur arrêté. On peut désormais lire sur son compte Weibo un texte officiel expliquant que « les héros et les martyrs ne doivent pas être déshonorés et [que] le cyberespace n’est pas un lieu hors la loi. Les organes de sécurité publique enquêteront sévèrement et traiteront les insultes, les calomnies ou les atteintes à la réputation et à l’honneur des martyrs, conformément à la loi ».

Depuis 2018, diffamer ou critiquer les martyrs est un crime. Pour avoir suggéré que le nombre de soldats chinois morts en 2020 lors du conflit frontalier avec l’Inde était plus élevé que les quatre décès officiellement reconnus, un blogueur a été condamné en juin à huit mois de prison.

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