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L’achat de votes, un fléau bulgare

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Des affiches électorales dans les rues du village d’Oreshets (Bulgarie), le 31 mars. Des affiches électorales dans les rues du village d’Oreshets (Bulgarie), le 31 mars.

LETTRE D’EUROPE CENTRALE

« Regardez ce village du centre de la Bulgarie, Boukovlak. En 2014, il a voté à 80 % pour le Mouvement des droits et des libertés [le parti de la communauté turque et rom] et, trois ans plus tard, en 2017, c’est le Gerb [parti conservateur] qui décroche presque toutes les voix. »

« Et Dolni Tsabar, au bord du Danube. Au début, j’ai cru à une erreur de données tellement c’était énorme. Mais, non, j’ai vérifié, et c’était bien vrai. En 2014, le taux de participation était de seulement 1 % et, trois ans plus tard, il est passé à 62 %, soit au-dessus de la moyenne nationale. Et le Gerb y a décroché 55 % des voix. »

Spécialiste de l’analyse de données, le Bulgare Nikola Tulechki connaît la carte électorale de son pays comme sa poche, même si c’est seulement depuis son ordinateur.

A 37 ans, ce chercheur, diplômé de l’université Toulouse-II, scrute les « anomalies » qui trahissent un phénomène qui perdure en Bulgarie, malgré les scandales : l’achat de votes. Nikola Tulechki a participé à une étude du fonds anticorruption bulgare, publiée lundi 29 mars à Sofia, à quelques jours des élections législatives, organisées dimanche 4 avril dans ce pays de 7 millions d’habitants.

Cet activiste de l’ONG Data for Good et une criminologue ont confirmé que la pratique était « toujours endémique et très bien organisée ». « Cela a commencé dès les premières élections démocratiques, en 1990, avec des cadeaux et puis cela s’est ensuite professionnalisé », raconte-t-il, en citant les multiples études qui ont documenté la pratique au niveau aussi bien anthropologique que statistique.

Anomalies statistiques

Dans un pays qui reste le plus pauvre de l’Union européenne (UE), « beaucoup d’électeurs sont prêts à vendre leur voix et attendent même les élections en se demandant quel parti va leur offrir quelque chose », assure M. Tulechki.

Le prix a même été déterminé : « En 2014, il se situait entre 30 et 50 levas [de 15 à 25 euros]. Lors des élections locales de 2019, il a atteint, à certains endroits, des nombres à trois chiffres. Et il y aura probablement des sommes plus élevées dans ces élections », affirme Tihomir Bezlov, analyste au Centre pour l’étude de la démocratie. Dans certaines régions, des intermédiaires proposent carrément des voix à la vente par paquets, notamment dans la communauté rom. Pour vérifier que le contrat est bien rempli, les électeurs doivent prendre une photo du bulletin dans l’isoloir, une pratique en théorie interdite mais incontrôlable.

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