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En Russie, l’ONG Memorial menacée de dissolution

Une femme tient une photo de la militante assassinée Natalia Estemirova, lors d’un rassemblement pour la réforme de la police, à Moscou, le 28 novembre 2009. ALEXEY SAZONOV / AFP

Etant donné le poids moral de l’organisation, en Russie comme à l’étranger, la nouvelle résonne comme un coup de tonnerre : le procureur général de Russie a demandé, jeudi 11 novembre, la dissolution de l’ONG Memorial, fer de lance et emblème de la société civile russe, dont le travail s’étend de la protection des droits de l’homme à l’étude des crimes du régime soviétique.

C’est l’ONG elle-même qui a fait part de la nouvelle, estimant qu’elle s’apparentait à « une décision politique d’anéantir Memorial ». Le document qui a été transmis à la Cour suprême évoque des « violations systématiques » de la loi sur les agents de l’étranger. Dans un communiqué diffusé plus tard, le bureau du procureur estime que le travail de l’ONG « viole la Constitution ».

La loi de 2012 sur les agents de l’étranger est devenue l’instrument le plus courant de pression contre la société civile russe et les médias indépendants, obligeant les organisations ou les personnes physiques désignées à se soumettre à un certain nombre d’obligations contraignantes.

« Nous avons toujours estimé que cette loi était absurde et faite pour détruire la société civile, mais nous avons fait notre possible pour nous y conformer et pouvoir ainsi continuer à travailler », explique au Monde Alexandre Tcherkassov, dirigeant de la branche Droits de l’homme de Memorial, qui reconnaît toutefois des ratés : « Nous avons fourni tous les rapports qui nous étaient demandés et inscrit notre statut [« d’agent de l’étranger »] sur toutes nos productions. Mais il y a eu des erreurs concernant certaines publications sur les réseaux sociaux ou sur des livres. »

Un signal envoyé par le pouvoir russe

Parmi la trentaine d’amendes reçues par Memorial depuis 2016, on trouve effectivement de tels cas : en septembre 2020, l’organisation avait été sanctionnée pour avoir proposé lors d’une foire aux livres des publications anciennes ne contenant pas de référence à son statut. Une autre concernait un courriel envoyé par un employé de Memorial au ministère des affaires étrangères et marqué de manière incorrecte.

La Cour suprême doit rendre son jugement le 25 novembre. « Nous ne baissons pas pavillon et nous comptons sur la solidarité, assure M. Tcherkassov. La loi est appliquée de façon sélective en Russie, alors nous ne pouvons croire que cette attaque obéit à des considérations purement juridiques. C’est une tentative de nous éliminer pour l’ensemble de notre œuvre. »

Difficile de dire si la solidarité, nationale comme internationale, influencera la décision, mais le fait est que la fermeture de Memorial serait perçue comme un événement d’ampleur et un signal envoyé par le pouvoir russe. Le conseil des droits de l’homme auprès du président, un organe modéré dans sa critique des autorités, a, d’ores et déjà, dit son intention de faire entendre sa voix.

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