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Le retour de la guerre froide ?

Le président américain Joe Biden (à gauche) à Washington, DC, le 2 juin 2021, et le président chinois Xi Jinping à Macao, le 18 décembre 2019. MANDEL NGAN, ANTHONY WALLACE / AFP

Histoire d’une notion. Dans son premier discours en tant que président américain, le 21 septembre 2021, devant l’Assemblée générale des Nations unies, Joe Biden s’est voulu rassurant : « Nous ne voulons pas d’une nouvelle guerre froide ou d’un monde divisé en blocs rigides. » Trois décennies après la chute du mur de Berlin puis l’effondrement de l’Union soviétique qui avaient marqué la victoire par K.-O. du camp occidental, le mot revient dans le débat public. « Le retour d’une certaine forme de guerre froide est une réalité », analyse Michel Duclos, conseiller à l’Institut Montaigne, relevant que « si la première opposait les Etats-Unis à une Union soviétique forte et une Chine faible, ceux-ci doivent faire face à la fois à une Chine très forte et à une Russie qui, même affaiblie par rapport à ce qu’elle fut, se montre très agressive ».

Certes, les différences entre les deux périodes sont évidentes. L’affrontement Est-Ouest entre 1947 et 1991 fut total, à la fois militaire, idéologique, économique et structurant l’ensemble des relations internationales pendant quarante ans. Les échanges entre les deux blocs étaient limités. La Chine, aujourd’hui, s’affirme comme un partenaire incontournable dans une économie mondialisée. Les grands défis communs dont la lutte contre le dérèglement climatique impliquent des réponses communes. Pékin n’en représente pas moins une menace par l’agressivité de ses ambitions géopolitiques régionales. Mais la confrontation évite, au moins pour le moment, tout conflit armé direct. D’où la référence à la guerre froide.

« Une paix qui n’est pas une paix »

L’expression apparaît pour la première fois sous la plume de George Orwell dans un article pour l’hebdomadaire britannique de gauche Tribune du 19 octobre 1945. Il prédisait qu’après les Américains les Soviétiques auraient aussi très vite la bombe et que se constituerait alors un équilibre de la terreur, « un état permanent de guerre froide » entre deux ou trois superpuissances. « Cette fin des guerres de grande envergure se ferait au coût de prolonger une paix qui n’est pas une paix », notait l’écrivain et journaliste. Le mot a ensuite été repris, en 1947, par le banquier Bernard Baruch, conseiller du président américain Harry Truman (1945-1953), puis par le journaliste Walter Lippmann qui, en 1947, publia le livre The Cold War.

Il est difficile de déterminer avec exactitude quand commença la guerre froide. « Il n’y eut aucune attaque surprise, aucune déclaration de guerre, ni même aucune rupture des relations diplomatiques, mais un sentiment croissant d’insécurité au plus haut niveau à Moscou comme à Washington et Londres », écrit John Lewis Gaddis, professeur d’histoire militaire et navale à Yale dans La Guerre froide (Les Belles Lettres, 2019), relevant que, avant même leur victoire commune sur le nazisme, les Occidentaux, d’un côté, les Soviétiques, de l’autre, étaient déjà en guerre « sur un plan idéologique et géopolitique ». Les conférences de Yalta et de Potsdam en 1945 avaient voulu créer un système de sécurité collective pour le monde et fixer des zones d’influence pour l’Europe. Elles sanctionnèrent la division du Vieux Continent en deux blocs et deux alliances militaires, l’OTAN d’un côté, le pacte de Varsovie de l’autre.

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