France World

Aux Pays-Bas, des enseignants toujours sous le choc de l’assassinat de Samuel Paty

Dans un établissement d’enseignement secondaire à Amsterdam, le 31 mai 2021. EVERT ELZINGA / AFP

LETTRE DE BRUXELLES

Il y a certains sujets qu’il ne traite plus, « parce qu’[il a] une famille », écrit un enseignant. Un autre se dit « plus prudent et plus inquiet ». Un troisième confie qu’il n’évoque plus certains thèmes « par peur des intimidations et de la violence ». L’assassinat par décapitation de Samuel Paty, le 16 octobre 2020, à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), impressionne toujours aux Pays-Bas.

Au point que deux associations regroupant des professeurs d’histoire, de sciences sociales et d’instruction civique ont interrogé leurs membres pour déterminer quelle influence cet événement avait exercée sur eux et sur leurs pratiques. Après la mort de l’enseignant français, tué par un réfugié tchétchène, des professeurs néerlandais avaient été menacés parce qu’ils avaient montré des caricatures de Mahomet, comme celle que leur collègue français avait extraites de Charlie Hebdo.

Quelque 150 enseignants ont rempli le questionnaire qui leur était adressé et un tiers d’entre eux avouent mieux préparer leurs cours mais aussi les aborder avec de la crainte.

Intéressant, mais moins que les témoignages apportés anonymement par les professeurs. Doutes et peurs émergent chez eux lorsqu’il s’agit d’aborder l’islamisme, la question du genre, le meurtre de l’Afro-Américain George Floyd par un policier blanc, le conflit israélo-palestinien, le génocide arménien ou encore le colonialisme. Dans certains établissements, la question de la Shoah n’est, elle, plus du tout évoquée, explique, dans De Volkskrant, Ton van der Schans, président de l’Association des professeurs d’histoire.

Une société polarisée

L’Université d’Amsterdam a, de son côté, voulu mesurer l’adhésion des jeunes à la notion de démocratie. Elle a sondé un échantillon représentatif d’élèves du cycle secondaire et la moitié d’entre eux ont répondu qu’ils n’avaient « pas d’avis » ou que la démocratie n’était « pas importante » à leurs yeux.

Les premiers assassinats politiques de l’histoire du pays (le dirigeant populiste Pim Fortuyn en 2002, puis le cinéaste Theo van Gogh en 2004) avaient pourtant incité les autorités à développer des programmes d’éducation civique. Il s’est révélé très difficile de les imposer dans un pays où la liberté de l’enseignement est un principe sacro-saint.

En 2016, un rapport officiel avait donc conclu à l’échec du projet, d’autant qu’à la fin du cycle secondaire, l’histoire est un cours optionnel et que les écoles néerlandaises se disent généralement débordées par d’autres tâches qui leur sont imposées : gérer, par exemple, les problèmes d’addiction à la drogue ou d’obésité.

Il vous reste 48.38% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Source

L’article Aux Pays-Bas, des enseignants toujours sous le choc de l’assassinat de Samuel Paty est apparu en premier sur zimo news.