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« La Formule E est sur une courbe vraiment ascendante »

Avant l’ePrix de Monaco, prévu samedi, Jean-Éric Vergne s’est confié à RMC Sport depuis la piste de kart où il a tout appris à Cormeilles-en-Vexin (Val-d’Oise). Le double champion du monde français de Formule E, pilote de l’écurie DS Techeetah, est revenu sur son début de saison qu’il juge « difficile », mais a aussi partagé sa satisfaction de voir la catégorie progresser et de pouvoir disputer les 24H du Mans avec Peugeot.

L’année dernière, pendant le premier confinement, le monde du sport automobile s’est converti aux courses virtuelles, avec succès incontestable. Ce qui a peut-être échappé à beaucoup, c’est que vous êtes à l’origine du premier événement qui a tout lancé…

C’était parti d’une bêtise! J’étais sur une terrasse d’un restaurant, il n’y avait pas de F1, tout le monde était un peu triste et j’ai fait un appel à tous les pilotes de Formule 1 et de Formule E pour leur proposer de faire le Grand Prix d’Australie en virtuel. Il y a eu un tel engouement que j’ai directement appelé mes associés de Veloce (une équipe d’e-sport, ndlr). On a beaucoup travaillé. J’ai passé mes journées au téléphone, pour organiser les courses et ça a eu un franc succès. La cote de Veloce a aussi énormément grimpé. Il y a un an, on était à deux doigts de faire faillite. Grâce à ça, quelques investisseurs sont venus et la société se porte extrêmement bien. On a su surfer sur la vague du Covid et, aujourd’hui, on est une des plus grosses boîtes d’e-sport en Angleterre.

Quel regard portez-vous sur votre début de saison en Formule E? Vous avez gagné à Rome, mais vous êtes à la 7e place du classement des pilotes après six courses.

Ce début de saison n’est pas trop mal, mais un peu difficile. À Valence (9e puis 7e sur les deux courses), on n’était tout simplement pas assez rapides. On connaît les points sur lesquels on doit travailler. La voiture n’est pas facile à piloter pour le moment. On a deux-trois soucis de balance. Ce ne sont pas de gros soucis au final, mais quand vous voyez les écarts, les équipes qui sont si proches… Améliorer la voiture d’un ou deux dixièmes nous changerait la vie. On n’est pas au mieux de notre forme, mais toute l’équipe travaille d’arrache-pied.

L’ePrix de Monaco, prévu ce samedi, marque la mi-saison. Quel est l’objectif sur ce circuit qui est désormais presque identique à celui utilisé en Formule 1?

On aura plus d’un mois avant l’autre course, à Puebla au Mexique. Monaco, c’est extrêmement important pour nous. Il va falloir qu’on mette un peu de gaz et que ça marche un peu mieux que les courses précédentes. Même si on a gagné à Rome, on n’est pas là où on veut être. Le nouveau tracé de Monaco, c’est sympa. Il y a un ou deux changements mineurs par rapport au vrai circuit, mais c’est génial qu’on puisse rouler là. Évidemment, les gens vont comparer les F1 aux FE, et on sera beaucoup plus lents. Mais la FE est sur une courbe vraiment ascendante. Chaque nouvelle génération de Formule E va beaucoup plus vite.

D’ailleurs, cette 7e saison de Formule E a obtenu la dénomination de « championnat du monde de la Fédération internationale de l’automobile ». Un autre signe que la catégorie avance.

Il y a encore du chemin à faire. C’est sympa, parce que j’ai connu son ascension en même temps que le championnat. C’est cool pour moi d’avoir fait partie de l’histoire depuis le début de la Formule. On a oeuvré au succès de la FE et vice versa. Si j’étais champion d’un championnat qui n’existe plus aujourd’hui, ça ne voudrait plus dire grand-chose. Dans mon malheur de partir de la Formule 1, j’ai eu beaucoup de chance.

Vous donnez l’impression d’être au meilleur de votre forme sur le plan mental, comme si vous êtiez devenu un sage du sport automobile après votre départ de la F1. Ce sont les bienfaits de l’expérience?

L’envie de gagner est toujours là. Après, ça me bouffe tellement de l’intérieur quand je ne gagne pas lors d’un week-end… J’essaie de faire en sorte que ça me mange un peu moins. Peut-être que j’essaie de moins extérioriser, parce que dans le passé j’extériorisais un peu trop on va dire! Je gueulais assez rapidement et assez facilement. J’essaie de me calmer là dessus. Quand on travaille dur pour quelque chose et qu’on se fait battre parce qu’on fait une erreur et parce qu’on n’a pas été assez forts, c’est dur. On ne se satisfait pas d’une deuxième place, bien souvent. Il faut remonter la pente dans les moments difficiles.

En général, tout se joue dans la tête. c’est un peu comme au foot. Quand je regarde la demi-finale aller de la Ligue des champions du Paris Saint-Germain, Manchester City se fait malmener toute la première période. Puis avec les mêmes joueurs, le même coach, le même stade, les mêmes conditions, les mecs ont réussi à renverser la vapeur. Tout ça, ce n’est que dans la tête. C’est la même chose dans le sport auto.

Après, j’ai beau être le mieux préparé, dans la meilleure situation dans ma tête, le plus fort que j’ai jamais été… Si tu n’as pas la voiture, si les Mercedes vont trois dixièmes au tour plus vite que moi, j’ai beau être le meilleur, ça va être compliqué de gagner. Alors qu’au foot ou dans les autres sports, quand on est le meilleur dans son meilleur jour, on est intouchable. C’est la limite dans notre sport, et c’est qui est compliqué. Ce sont les aléas du sport mécanique.

Qu’en est-il de votre aventure en endurance?

Je viens de signer avec Peugeot pour les 24 heures du Mans. On va commencer le travail à la fin de l’année ou au début de l’année prochaine avec la voiture. C’est un truc très cool, je suis content de faire partie de l’histoire du retour de Peugeot aux Mans dans la catégorie reine (Hypercar). C’est un peu rêve de rouler au Mans dans la meilleure des catégories.

Quand vous parlez du Mans, c’est avec un large sourire.

Tous les pilotes regardent le Mans avec intérêt. C’est une des plus belles courses au monde. L’ayant fait plusieurs fois, c’est génial. L’ambiance qu’on a au Mans, on l’a dans aucune autre course. Même Monaco en F1, ce n’est pas pareil. C’est génial.

Monaco, c’est une course d’une heure et demi. T’es tout seul dans ta voiture. Le Mans, c’est toute la semaine. Il y a la pesée officielle le lundi. On est dans la ville avec les voitures, des milliers de personnes qui attendent… On rentre dans le centre-ville historique, on est déjà dans l’ambiance. On a une énorme sénce d’autographes le mardi, on voit des milliers de personnes défiler. Et j’adore dormir dans un motorhome sur le circuit. Je ne bouge jamais du circuit! C’est mortel! Le vendredi, on a la parade des pilotes qui dure toute l’après-midi dans la ville. Il y a une tonne de personnes. On est dans ces voitures historiques, à rouler au ralenti, on jette des goodies, on se marre avec nos coéquipiers… C’est génial! Peut-être que c’est un peu comme ça aux 500 miles d’Indianapolis, au niveau ambiance.

Par le passé, vous aviez parlé d’une envie de vous impliquer dans les coulisses du sport automobile à la fin de votre carrière de pilote. C’est toujours le cas?

Le sport auto, c’est évidemment quelque chose que je connais très bien depuis que j’ai quatre ans. Je connais les tenants et aboutissants de ce sport là. C’est ma vie. Je ne me suis jamais posé la question de ce que je ferais d’autre plus tard. Je prends le maximum que le sport auto peut m’offrir. Mais à un moment donné, on va redonner. Est-ce que ce sera former des jeunes pilotes, aider des championnats, travailler avec la FIA sur le futur du sport automobile en général? Je ne sais pas si je ferai de la politique, car je suis un peu connu pour mon franc-parler et il faudrait que je change un peu! Mais de la politique, on en fait déjà un peu, parce que la voix des pilotes est entendue par les grandes instances sur des sujets un peu chauds. J’espère avoir encore au moins dix ans au même niveau en tant que pilote, et après j’aurai le temps de voir ce que je ferai.

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