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La bataille de Hlaing Thar Yar, tournant du mouvement de résistance en Birmanie

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Un nuage de fumée se dégage de la zone industrielle de Hlaing Thar Yar, en banlieue de Rangoun (Birmanie), le 14 mars. Un nuage de fumée se dégage de la zone industrielle de Hlaing Thar Yar, en banlieue de Rangoun (Birmanie), le 14 mars.

De la fumée s’échappe encore des cendres des barricades marquant l’entrée de Hlaing Thar Yar, la zone industrielle la plus dense de Birmanie, au nord-ouest de Rangoun. Des soldats bloquent les routes principales. La loi martiale y a été décrétée le 15 mars, le lendemain d’une journée sanglante, faisant au moins 50 morts rien que dans cette banlieue, soit le bilan le plus meurtrier depuis le début du coup d’Etat.

« Nous n’avons plus Internet. Les rues sont complètement vides. Nous avons peur de nous faire tirer dessus si nous sortons. La nuit, on entend des tirs », témoignait au téléphone, il y a quelques jours, Ko Kyaw (le nom a été changé), 23 ans, employé d’une ONG, résidant à Hlaing Thar Yar, et enfermé chez lui depuis soixante-douze heures. Les militaires, fusil en main, forcent les habitants à démonter les amas de sable et de pneus qui protègent chaque quartier. Le silence domine, seulement interrompu par les camionnettes où s’amassent les ouvriers qui repartent dans leurs villages d’origine.

La bataille de Hlaing Thar Yar a marqué un tournant dans le mouvement de résistance birman. Le 14 mars, après plus d’un mois de grève générale, des centaines d’habitants du quartier et d’ouvrières s’étaient réunis pour manifester au milieu des usines, comme ils l’avaient déjà fait à plusieurs reprises. Certains étaient armés de sabres, de cocktails Molotov et de lance-pierres, prêts à en découdre avec les militaires.

L’explosion de l’industrie textile

« Même si c’est un piège de l’armée, nous n’avons plus d’autre choix que de nous battre. Ils nous tirent dessus lorsque nous manifestons pacifiquement. Si nous ne gagnons pas, ceux qui sont morts l’auront été en vain », nous avait dit, la veille du défilé, Su Nwe, 25 ans, serveuse dans un restaurant chinois du quartier. Ce jour-là, Mahn Win Khaing Than, le vice-président du gouvernement en exil formé par les parlementaires de la Ligue nationale pour la démocratie (NLD), avait déclaré sur Facebook que « le peuple birman a le droit à l’autodéfense ». A la mi-journée, le 14, les manifestants ont été accueillis par des tirs de sniper et d’armes automatiques.

La zone est un condensé des effets de la démocratisation entamée en 2011 et brutalement stoppée par le coup d’Etat

Hlaing Thar Yar abrite quelque 700 000 migrants, principalement des ouvriers du textile vivant dans le plus grand bidonville de Birmanie. Séparée de Rangoun par la rivière Hlaing, la banlieue se partage entre les imposants hangars gris des usines, qui ont poussé un peu partout ces dernières années, les dortoirs et huttes en bambou déployés le long des routes ou sur les berges de la rivière. Le district accueille également plusieurs terrains de golf, appréciés des militaires, et le luxueux condominium FMI City, où habitent les gérants chinois des usines et d’autres entreprises chinoises de Rangoun.

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